ments et affirment sa resolution de
partir. "Quoique tu m'aies connu enfant, s'ecrie-t-il, crois aujourd'hui
que je suis homme... Tu me dis que je me trompe sur ce que j'eprouve. Non,
je ne me trompe pas, j'eprouve le seul amour que j'aurai de ma vie...
Adieu, ma bien-aimee Georgette, ton enfant, Alfred." Toutefois, avant de
se rendre a Toulouse d'abord, chez son oncle, puis a Cadix, il sollicite
un supreme entretien. Ces entretiens-la sont perilleux. Le plus souvent,
ils debutent par des adieux et s'achevent en des recommencements. "Tu me
dis que tu ne crains pas de blesser Pierre en me voyant. Quoi donc alors?
Ta position n'est pas changee? Mon amour-propre, dis-tu? Ecoute, ecoute,
George, si tu as du coeur, rencontrons-nous quelque part, chez moi, chez
toi, au Jardin des Plantes, au cimetiere, au tombeau de mon pere c'est la
que je voulais te dire adieu... Songe que je pars, mon enfant. Ne fermons
pas legerement des portes eternelles." Et la lettre se termine, a la
pensee de ne pas la revoir, sur cette apostrophe et cette adjuration: "Ah!
c'est trop, c'est trop. Je suis bien jeune, mon Dieu! Qu'ai-je donc fait?"
La reponse de George Sand est calme et raisonnable. Elle s'abrite derriere
Pagello, derriere ses projets de voyage a Nohant. "Il est inquiet,
dit-elle, et il n'a pas tort, puisque tu es si trouble, et il voit bien
que cela me fait du mal... Je lui ai tout dit. Il comprend tout, il est
bon. Il veut que je te voie sans lui une derniere fois et que je te decide
a rester, au moins jusqu'a mon retour de Nohant." Dans cette meme lettre,
elle autorise, elle invite Alfred de Musset a venir quai Malaquais: car
elle est trop malade pour sortir, et il fait un temps affreux. Il vint, il
s'attarda, et l'on pourrait croire qu'il allait abandonner ses idees de
depart. Au contraire, il s'y attache, apres une nuit qui porte conseil. Il
ira a Baden. La lettre ou il le signifie, au lendemain de l'entrevue de
reconciliation, a ete par lui tres attentivement et tres eloquemment
composee: "Notre amitie est consacree, mon enfant. Elle a recu hier,
devant Dieu, le saint bapteme de nos larmes. Elle est immortelle comme
lui. Je ne crains plus rien ni n'espere plus rien. J'ai fini sur la terre.
Il ne m'etait pas reserve d'avoir un plus grand bonheur. Eh bien, ma soeur
cherie, je vais quitter ma patrie, ma mere, mes amis, le monde de ma
jeunesse; je vais partir seul, pour toujours, et je remercie Dieu. Celui
qui est aime de toi ne peut p
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