gediees--la separation de corps etait
maintenue et la garde des deux enfants attribuee a la mere.
George Sand atteignait-elle au terme de ses angoisses? Non pas. Il lui
fallut encore aller en appel. Tour a tour alarmee et confiante, elle
ecrivait le 5 mai a Franz Liszt, qui avait accompagne la comtesse d'Agoult
a Geneve: "Mon proces a ete gagne; puis l'adversaire, apres avoir engage
son honneur a ne pas plaider, s'est mis a manquer de parole et a oublier
sa signature et son serment, comme des bagatelles qui ne sont plus de
mode. Si la possession de mes enfants et la securite de ma vie n'etaient
en jeu, vraiment ce ne serait pas la peine de les defendre au prix de tant
d'ennuis. Je combats par devoir plutot que par necessite." Le 11 mai,
tandis que son sort se debattait au tribunal de La Chatre, elle dormait
profondement. On dut la reveiller a une heure de l'apres-midi, pour lui
apprendre que Michel (de Bourges) avait fait pleurer l'auditoire et que
son proces etait gagne. Provisoirement du moins. M. Dudevant, campe a
Nohant, ne se souciait pas de rendre la dot de sa femme. Il voulut un
nouvel eclat a l'audience de la Cour. George Sand, etablie a La Chatre
chez des amis et toujours ardente au travail, etait armee pour la lutte.
"S'il ne s'agissait que de ma fortune, ecrit-elle le 25 mai a madame
d'Agoult, je ne voudrais pas y sacrifier un jour de la vie du coeur; mais
il s'agit de ma progeniture, mes seules amours, et a laquelle je
sacrifierais les sept plus belles etoiles du firmament, si je les avais."
A aucun prix, elle n'admettait qu'on put la separer de ses enfants. Elle
invoquait la justice et la loi, mais elle etait prete a entrer en revolte,
si la magistrature se montrait defavorable a ses revendications. De Paris
elle avait ramene Solange, et toutes ses dispositions etaient prises pour
enlever Maurice, pensionnaire au college Henri IV. Elle placait les droits
maternels au-dessus de tous autres et deniait a la societe la faculte de
les annuler ou de les amoindrir. "La nature, s'ecrie-t-elle, n'accepte pas
de tels arrets, et jamais on ne persuadera a une mere que ses enfants ne
sont pas a elle plus qu'a leur pere. Les enfants ne s'y trompent pas non
plus." Voila en quel etat d'esprit elle comparut devant la Cour de Bourges,
dont l'opinion, au seuil des debats, lui etait plutot hostile. Une
legende, accreditee parmi l'aristocratie et la haute bourgeoisie locales,
la representait comme une creature extravagante et sa
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