Aldini_ et l'_Uscoque_. Elle ecrivit les _Maitres
Mosaistes_ pour son fils, qui n'avait encore lu qu'un roman, _Paul et
Virginie_. "Cette lecture, dit-elle, etait trop forte pour les nerfs d'un
pauvre enfant. Il avait tant pleure, que je lui avais promis de lui faire
un roman ou il n'y aurait pas d'amour et ou toutes choses finiraient pour
le mieux." A cette fin, elle composa une nouvelle assez longue relatant la
rivalite professionnelle qui surgit entre deux groupes de mosaistes de
Saint-Marc a l'epoque du Tintoret, les Zuccatti et les Bianchini. Sous le
couvert de la fiction, c'est une description de Venise, avec quelques
pages emouvantes sur ces effroyables plombs que Silvio Pellico a voues a
notre execration. On sent que George Sand, avec tous les liberaux et tous
les democrates de son temps, deteste l'occupation autrichienne sous
laquelle gemit la ville des Doges. Et le volume se termine par le
rayonnement d'une aurore qui incite l'un des personnages a cette reflexion
melancolique: "Voila la seule chose que l'etranger ne puisse pas nous
oter. Si un decret pouvait empecher le soleil de se lever radieux sur nos
coupoles, il y a longtemps que trois sbires eussent ete lui signifier de
garder ses sourires et ses regards d'amour pour les murs de Vienne."
Les lettres de George Sand a Luigi Calamatta, l'eminent graveur dont la
fille Lina devait en 1863 epouser Maurice Sand, nous apprennent qu'en mai
1837, a Nohant, elle travaillait aux _Maitres Mosaistes_, "un petit conte
qui vous plaira, j'espere, non pas qu'il vaille mieux que le reste, mais
parce qu'il est dans nos idees et dans nos gouts, a nous _artistes_." Puis,
le 12 juillet, elle ecrit au meme Calamatta, qui lui avait envoye des
dessins sur Venise et la Renaissance: "Lisez, dans le prochain numero de
la _Revue_, les _Maitres Mosaistes_. C'est peu de chose, mais j'ai pense a
vous en tracant le caractere de Valerio. J'ai pense aussi a votre rivalite
avec Mercuri. Enfin, je crois que cette bluette reveillera en vous
quelques-unes de nos sympathies et de nos saintes illusions de jeunesse."
Il y a, effectivement, dans cette oeuvre delicate et chaste, une
atmosphere de serenite. On percoit que l'ame de l'auteur etait en pleine
quietude: l'accalmie apres l'orage. "Je ne sais pourquoi, dit-elle, j'ai
ecrit peu de livres avec autant de plaisir que celui-la. C'etait a la
campagne, par un ete aussi chaud que le climat de l'Italie, que je venais
de quitter. Jamais je n'ai vu a
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