r le lit ou il avait couche, sous pretexte que la police ordonnait de
le bruler.
Le 8 mars, ils etaient a Marseille, puis ils firent une excursion a Genes.
Qu'allait devenir Chopin? Il demanda a George Sand de la suivre a Nohant.
Elle acquiesca, mais, dans l'_Histoire de ma Vie_, revenue a d'autres
sentiments, elle fournit des explications peu vraisemblables. "La
perspective, dit-elle, de cette sorte d'alliance de famille avec un ami
nouveau me donna a reflechir. Je fus effrayee de la tache que j'allais
accepter et que j'avais crue devoir se borner au voyage en Espagne." A ce
prix, elle obeissait, non pas a la passion, mais a une sorte d'adoration
maternelle tres vive, tres vraie, qu'elle declare d'ailleurs moins
profonde en elle que "l'amour des entrailles, le seul sentiment chaste qui
puisse etre passionne." Enfin, elle se persuade ou veut nous persuader
qu'elle accueillit Chopin, pour se defendre contre l'eventualite d'autres
amours qui auraient risque de la distraire de ses enfants. Elle y vit,
citons le mot, un _preservatif_ contre des emotions qu'elle ne voulait
plus connaitre. Et elle s'ecrie, longtemps apres, en un elan de
phraseologie mystique: "Un devoir de plus dans ma vie, deja si remplie et
si accablee de fatigue, me parut une chance de plus pour l'austerite vers
laquelle je me sentais attiree avec une sorte d'enthousiasme religieux."
Bref, elle resume ainsi sa vocation sentimentale: "J'avais de la tendresse
et le besoin imperieux d'exercer cet instinct-la. Il me fallait cherir ou
mourir." Elle a beaucoup cheri, et elle est morte plus que septuagenaire.
Huit annees durant, Chopin fut un compagnon absorbant et tyrannique.
Ilvoulait chaque annee retourner a Nohant, et chaque annee il y
languissait. Mondain, il s'ennuyait a la campagne. Aristocrate et raffine,
il etait froisse et choque dans un milieu sans appret, ou Hippolyte
Chatiron, le batard ne heureux, frere naturel de George Sand, lui
prodiguait ses effusions d'apres boire. Catholique exalte, il ne pouvait
communier en la religion humanitaire de Lamennais ou de Pierre Leroux. Il
demeurait pourtant, attache par l'admiration, l'adulation, les caresses
enveloppantes qui l'ensorcelaient. Ne se donnant qu'a demi, il voulait
qu'on lui appartint tout a fait. L'_Histoire de ma Vie_ observe avec une
nettete un peu cruelle: "Il n'etait pas ne exclusif dans ses affections;
il ne l'etait que par rapport a celles qu'il exigeait. Il aimait
passionnement trois femme
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