t quelque fadaise pour se moquer de lui, mais sans mauvais
vouloir, et pour l'amusement de le voir rougir; car il rougissait comme
une fille quand cette femme lui parlait, et il se sentait mal a son aise."
Puis elle le considera avec plus d'attention et de contentement; elle le
trouva _diablement beau garcon_. Or il l'etait. "Il ne ressemblait pas aux
autres enfants de campagne, qui sont trapus et comme tasses a cet age-la,
et qui ne font mine de se denouer et de devenir quelque chose que deux ou
trois ans plus tard. Lui, il etait deja grand, bien bati; il avait la peau
blanche, meme en temps de moisson, et des cheveux tout frises qui etaient
comme brunets a la racine et finissaient en couleur d'or."
_Francois le Champi_ paraissait en feuilleton dans le _Journal des Debats_,
lorsque eclata la revolution de fevrier 1848. Il fallut interrompre la
publication: la politique releguait a l'arriere-plan la litterature
romanesque. Quatre mois revolus, George Sand, desabusee, reprenait sa
plume rustique et composait la _Petite Fadette_. Elle explique, dans la
notice de l'ouvrage, que "l'horreur profonde du sang verse de part et
d'autre et une sorte de desespoir a la vue de cette haine, de ces injures,
de ces menaces, de ces calomnies qui montent vers le ciel comme un impur
holocauste, a la suite des convulsions sociales", s'emparerent de son
esprit, au lendemain des journees de Juin. Elle alla demander au contact
de la nature et a la contemplation de la vie rurale, sinon le bonheur, du
moins la foi. Tout comme un politique evince, elle retournait a ses cheres
etudes. Les lettres ont une vertu mysterieusement apaisante, que George
Sand preconise. "L'artiste, dit-elle, qui n'est que le reflet et l'echo
d'une generation assez semblable a lui, eprouve le besoin imperieux de
detourner la vue et de distraire l'imagination, en se reportant vers un
ideal de calme, d'innocence et de reverie. Sa mission est de celebrer la
douceur, la confiance, l'amitie, et de rappeler ainsi aux hommes endurcis
ou decourages, que les moeurs pures, les sentiments tendres et l'equite
primitive sont ou peuvent etre encore de ce monde. Les allusions directes
aux malheurs presents, l'appel aux passions qui fermentent, ce n'est point
la le chemin du salut; mieux vaut une douce chanson, un son de pipeau
rustique, un conte pour endormir les petits enfants sans frayeur et sans
souffrance, que le spectacle des maux reels renforces et rembrunis encore
par les couleur
|