ier_; et que, quand il respecte le vrai et le bon, il est dans
une voie ou Dieu le benit toujours. L'art est de tous les temps et de tous
les pays; son bienfait particulier est precisement de vivre encore quand
tout semble mourir."
George Sand va-t-elle traduire en actes cette fiere profession de foi?
Trouvera-t-elle les memes inspirations eloquentes et pathetiques, alors
que l'exaltation enthousiaste de ses premieres oeuvres fera place a des
sentiments plus ponderes et plus bourgeois? Il semble qu'elle ait voulu
dresser son bilan en composant l'_Histoire de ma Vie_, qu'elle termine
ou plutot qu'elle arrete a la veille des evenements de 1848. Son oeuvre, a
partir de cette epoque, cesse d'etre orientee, soit vers la these
conjugale, soit vers la formule socialiste, soit vers les horizons
rustiques, et tente un peu au hasard des sentiers nouveaux.
Le _Chateau des Desertes_ est la suite de _Lucrezia Floriani_: dans cette
demeure des Boccaferri on joue la comedie de salon sur une petite estrade,
comme a Nohant.--Les _Mississipiens_ sont une piece ecrite a la hate sur
l'affaire de Law, et qui met aux prises la noblesse et la roture.--Dans
les _Maitres Sonneurs_, publies en 1853, resonne un echo, melancoliquement
affaibli, des romans champetres. La dedicace est adressee a cet Eugene
Lambert, l'hote familier de Nohant, sorte d'enfant adoptif, qui disait un
jour a George Sand: "A propos, je suis venu ici, il y a bientot dix ans,
pour y passer un mois. Il faut pourtant que je songe a m'en aller." Dans
la preface des _Maitres Sonneurs_, elle lui repond: "Je t'ai laisse partir,
mais a la condition que tu reviendrais passer ici tous les etes. Je
t'envoie ce roman comme un son lointain de nos cornemuses, pour te
rappeler que les feuilles poussent, que les rossignols sont arrives, et
que la grande fete printaniere de la nature va commencer aux champs." Sur
les faits et gestes des muletiers maitres sonneurs du Bourbonnais, et
notamment du Grand Bucheur dont le fils Huriel aime la gracieuse Brulette,
se detachent quelques jolis dessins de la vie campagnarde, un brin
poetisee. Voici des propos tenus entre deux danses, a une assemblee
villageoise: "Je suis sotte et revasseuse, dit la fille, enfin je
m'imagine d'etre aussi mal placee en une compagnie que le serait un loup
ou un renard que l'on inviterait a danser." Et le gars replique: "Vous
n'avez pourtant mine de loup ni d'aucune bete chafouine, et vous dansez
d'une aussi belle grace
|