t-elle,
qui n'obtient pas le _succes d'argent_, ne trouve plus que des portes
fermees dans les directions de theatre." A elle, on lui fait grief de
presenter de trop grands caracteres, des personnages trop honnetes,
partant invraisemblables, de ne pas chercher les effets. En depit des
aristarques, elle persiste a affirmer, sinon a atteindre, la superiorite
d'une forme dramatique, uniquement soucieuse de "flatter le beau cote de
la nature humaine, les instincts eleves qui, tot ou tard, reprennent le
dessus." Si la critique lui a ete parfois severe, amere et meme
_irreflechie_, elle garde l'espoir d'un retour favorable. "Nous
l'attendons, ecrit-elle, a des jours plus rassis et a des jugements moins
precipites. Ce qu'elle nous accordera un jour, ce sera de n'avoir pas
manque de conscience et de dignite dans nos etudes de la vie humaine; ce
sera d'avoir fait de patients efforts pour introduire la pensee du
spectateur dans un monde plus pur et mieux inspire que le triste et dur
courant de la vie terre a terre. Nous avons cru que c'etait la le but du
theatre, et que ce delassement, qui tient tant de place dans la vie
civilisee, devait etre une aspiration aux choses elevees, un mirage
poetique dans le desert de la realite." En effet, l'oeuvre dramatique de
George Sand est aux antipodes du realisme. Elle n'offre pas, comme on
disait alors, un daguerreotype des miseres et des plaies humaines, mais un
tableau riant, embelli, un peu idyllique. Son souci etait de reagir contre
le laid, le bas et le faux, et de poetiser la vie. Il en est parfois
besoin. Et faut-il nous etonner si un romancier produisit un theatre
romanesque?
La premiere piece de George Sand fut _Cosima ou la Haine dans l'amour_,
drame en cinq actes et un prologue, represente a la Comedie-Francaise le
29 avril 1840. La preface constate que _Cosima_ fut fort mal accueillie,
et elle ajoute: "L'auteur ne s'est fait illusion ni la veille ni le
lendemain sur l'issue de cette premiere soiree. Il attend fort
paisiblement un auditoire plus calme et plus indulgent. Il a droit a cette
indulgence, il y compte." Moins solennelle et encore plus sincere est
l'impression formulee dans une lettre du 1er mai au graveur Calamatta:
"J'ai ete huee et sifflee comme je m'y attendais. Chaque mot approuve et
aime de toi et de mes amis a souleve des eclats de rire et des tempetes
d'indignation. On criait sur tous les bancs que la piece etait immorale,
et il n'est pas sur que le gouvernement
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