l'ouvrage le tour vraiment
dramatique. La veille de la premiere representation, elle ecrit a Maurice:
"Le theatre, depuis le directeur jusqu'aux ouvreuses, dont l'une m'appelle
_notre tresor_, les musiciens, les machinistes, la troupe, les allumeurs
de quinquets, les pompiers, pleurent a la repetition comme un tas de veaux
et dans l'ivresse d'un succes qui va depasser celui du _Champi_." Le
lendemain, elle raconte a son fils les ovations frenetiques, et que les
etudiants l'ont escortee aux cris de "Vive George Sand! Vive _Mademoiselle
La Quintinie!_ A bas les clericaux!" Puis cinq ou six mille personnes sont
allees manifester devant le club catholique et la maison des Jesuites, en
chantant: _Esprit saint, descendez en nous!_ La police les a dispersees
avec quelque rudesse, peut-etre parce qu'on saluait l'imperatrice par les
couplets du _Sire de Framboisy_. Dans la salle, c'etait un enthousiasme
confinant au delire. L'empereur applaudissait et pleurait. De meme Gustave
Flaubert. Le prince Jerome faisait l'office de chef de claque, en criant a
tue-tete. George Sand etait radieuse.
Elle retrouvera un succes presque egal avec une piece a these, l'_Autre_,
representee a l'Odeon, le 25 fevrier 1870. Il s'y pose un assez curieux
cas de conscience: Une jeune fille doit-elle pardonner a celui qui est son
veritable pere, hors du mariage, et absoudre ainsi la faute de sa mere?
Les divers personnages epiloguent. La morale du pardon est indiquee par la
vieille grand'mere, et l'_autre_, qui s'appelle Maxwell, erige ainsi sa
protestation, pareille a celle du marquis de Neste, dans l'_Enigme_ de M.
Paul Hervieu: "J'en appelle a la justice de l'avenir. Il faudra bien que
la pitie entre dans les jugements humains et qu'on choisisse entre
proteger ou pardonner! Mais le monde ne comprend pas encore."
De moindre valeur, _Cadio_, qui fut primitivement un roman dialogue en
onze parties, puis un drame sur la guerre de Vendee, ou l'on voit
l'ascension du peuple, et le paysan Cadio, devenu capitaine republicain,
rehabiliter la fille au sang bleu, deshonoree par le vil patricien
Saint-Gueltas;--ensuite, les _Beaux Messieurs de Bois-Dore_, extraits du
roman par M. Paul Meurice, et ou Bocage trouva le dernier role, les
supremes applaudissements d'une glorieuse carriere, assombrie vers le
declin par la double eclipse de la Republique et du romantisme.
Faut-il ranger dans le bagage dramatique de George Sand les essais et les
fantaisies qu'elle r
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