ligion du devoir, ils esperaient que
leur mort serait feconde. Ils croyaient trop a l'excellence soutenue de la
nature humaine; ils la jugeaient d'apres eux-memes. Ah! mes amis, que
votre vie est belle, puisque, pour y trouver une faute, il faut faire, au
nom de la froide raison, le proces aux plus nobles sentiments dont l'ame
de l'homme soit capable! La veritable grandeur de Barbes se manifesta dans
son attitude devant ses juges et se completa dans le long martyre de la
prison. C'est la que son ame s'eleva jusqu'a la saintete. C'est du silence
de cette ame profondement humble et pieusement resignee qu'est sorti le
plus eloquent et le plus pur enseignement a la vertu qu'il ait ete donne a
ce siecle de comprendre. Les lettres de Barbes a ses amis sont dignes des
plus beaux temps de la foi."
A ce chevalier, a ce paladin heroique de la democratie, aboutissait le
cycle des enthousiasmes de George Sand. Elle avait tour a tour demande la
certitude philosophique et la verite sociale aux sources les plus diverses;
elle avait interroge le passe et le present, elle s'etait efforcee
d'arracher a l'avenir son redoutable secret. Et elle s'ecrie, au terme de
l'_Histoire de ma Vie_: "_Terre_ de Pierre Leroux, _Ciel_ de Jean Reynaud,
_Univers_ de Leibnitz, _Charite_ de Lamennais, vous montez ensemble vers
le Dieu de Jesus... Quand, avec la jeunesse de mon temps, je secouais la
voute de plomb des mysteres, Lamennais vint a propos etayer les parties
sacrees du temple. Quand, indignes apres les lois de septembre, nous
etions prets encore a renverser le sanctuaire reserve, Leroux vint,
eloquent, ingenieux, sublime, nous promettre le regne du ciel sur cette
meme terre que nous maudissions. Et de nos jours, comme nous desesperions
encore, Reynaud, deja grand, s'est leve plus grand encore pour nous ouvrir,
au nom de la science et de la foi, au nom de Leibnitz et de Jesus,
l'infini des mondes comme une patrie qui nous reclame."
La Republique, en effet, qu'elle attend, qu'elle appelle, c'est l'Evangile
en acte, c'est la realisation de cette doctrine "toute d'ideal et de
sentiment sublime" qui fut apportee aux hommes par le Nazareen. Du haut de
ses reves, elle devait choir dans la realite. La desillusion sera cruelle.
Douee d'une intelligence religieuse et d'une raison anticlericale, elle
etait deliberement hostile a la theologie et aux pratiques du
catholicisme. L'Eglise romaine lui apparaissait inconciliable avec
l'esprit de liberte. Le 1
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