3 novembre 1844, elle repondait a un desservant
qui, par circulaire, venait la solliciter pour une oeuvre pie: "Depuis
qu'il n'y a plus, dans la foi catholique, ni discussions, ni conciles, ni
progres, ni lumieres, je la regarde comme une lettre morte, qui s'est
placee comme un frein politique au-dessous des trones et au-dessus des
peuples. C'est a mes yeux un voile mensonger sur la parole du Christ, une
fausse interpretation des sublimes Evangiles, et un obstacle insurmontable
a la sainte egalite que Dieu promet, que Dieu accordera aux hommes sur la
terre comme au ciel." Plus tard, en fevrier 1848, a la veille de la
Revolution, George Sand communique au _Constitutionnel_ une lettre
adressee a Pie IX par Joseph Mazzini, et elle y ajoute un commentaire qui
se termine par cette adjuration: "Courage, Saint-Pere! Soyez chretien!"
C'est avec le meme instinct de generosite confiante et un peu credule
qu'elle se tourne vers le prince Louis-Napoleon Bonaparte, prisonnier au
fort de Ham, pour le feliciter de son "remarquable travail, l'_Extinction
du Pauperisme_." Cette correspondance est du mois de decembre 1844. George
Sand etait alors vaguement communiste, tout au moins dans le _Compagnon du
Tour de France_, le _Meunier d'Angibault_ et le _Peche de Monsieur
Antoine_. Elle compte, pour assurer le triomphe de la liberte, sur
l'imperial reveur, chez qui se derobe un sinistre ambitieux. En lui elle
ne veut voir qu'un guerrier captif, un heros desarme, un grand citoyen.
Elle demande impatiemment a l'_homme d'elite_ de tirer la France des mains
d'un _homme vulgaire, pour ne rien dire de pis_. Par la elle a designe
Louis-Philippe. Comme la plupart des contemporains, elle subit la
fascination de la legende napoleonienne. "Ce n'est pas, dit-elle, le nom
terrible et magnifique que vous portez qui nous eut seduit. Nous avons a
la fois diminue et grandi depuis les jours d'ivresse sublime qu'IL nous a
donnes: son regne illustre n'est plus de ce monde, et l'heritier de son
nom se preoccupe du sort des proletaires!... Quant a moi personnellement,
je ne connais pas le soupcon, et, s'il dependait de moi, apres vous avoir
lu, j'aurais foi en vos promesses et j'ouvrirais la prison pour vous faire
sortir, la main pour vous recevoir... Parlez-nous donc encore de liberte,
noble captif! Le peuple est comme vous dans les fers. Le Napoleon
d'aujourd'hui est celui qui personnifie la douleur du peuple comme l'autre
personnifiait sa gloire." A celebrer a
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