uits dans la forme et
la langue de la logique, avec une lucidite et une rigueur que les
theologiens de l'Occident ont rarement egalees. L'ouvrage n'a peut-etre
pas une grande profondeur, ni une veritable originalite. Mais il est
ecrit avec une precision qui ne manque point d'elegance, et l'auteur
y fait, avec une parfaite possession du langage scientifique,
l'application de la dialectique au dogme. On ne saurait cependant lui
donner pour disciples les premiers de nos scolastiques. Rien n'annonce
qu'il leur fut connu. S'il est vrai que la troisieme partie de son livre
ait ete, sous ce titre, _de orthodoxa Fide_, traduite on latin pour la
premiere fois par ordre du pape Eugene III[152], ce ne fut qu'apres la
mort d'Abelard dont les ecrits, nous le croyons du moins, ne mentionnent
nulle part le nom de saint Jean Damascene. La theologie scolastique est
donc nee en dehors de l'influence de ce Pere; il en a ete le precurseur
plutot que le createur; mais apres qu'elle fut venue au monde, il a
puissamment influe sur ses destinees; il est devenu une de ses autorites
favorites, et on a regarde son traite comme le type du celebre livre de
Pierre Lombard. Aussi a-t-il partage dans l'opinion du monde le sort des
scolastiques. Exalte avec eux, avec eux deprime, il a merite que leurs
grands adversaires calvinistes fissent un reproche a Melanchton de
l'avoir imite, et que leur plus violent ennemi, Luther, dit de lui: "Il
fait trop de philosophie, _nimium philosophatur_[153]."
[Note 151: [Grec: Pege gnosios], _Fons scientiae_. Dans une dedicace au
pere Goeme, eveque de Maiuine, il dit qu'il a commence par recueillir
tout le meilleur des plus sages parmi les gentils c'est sa philosophie,
objet du premier traite intitule Dialectique. Le second, [Grec: Peri
aireston], n'est guere qu'un denombrement de systemes assez sec et fort
peu exact pour la partie philosophique. Le troisieme, [Grec: Ekdotis
akrizes tes orthodoxes Pistios], est un ouvrage en quatre livres qui
peut se lire encore avec fruit et meme avec plaisir. On a accuse
l'auteur de pelagianisme et de nouveaute dangereuse dans la phraseologie
qu'il emploie. Baronius et Bellarmin ne l'approuvent pas en tout; les
docteurs calvinistes le censurent severement. Mais il ne me parait
Ouvertement dans l'erreur que touchant la procession du Saint-Esprit. Il
se rapproche sur ce point du sentiment des Grecs. (S.P.N. Joan. Damasc.
_Op._, ed. Lequien, 2 vol. in fol. Paris, 1712, t. 1, p. 7, 70, 1
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