erre et son auteur avec elle, et impose a Pierre, comme
heretique (_tanquam haeretico_), un perpetuel silence. Il estime en
outre que tous les sectateurs et defenseurs de son erreur devront etre
sequestres du commerce des fideles et enchaines dans les liens de
l'excommunication. On ajoute que le pape ordonna de livrer aux flammes
les livres d'Abelard, et que lui-meme les fit bruler a Rome[323].
[Note 321: S. Bern. _Op._, ep. CXCIV; Innocentius episc.
venerabilibus fratribus.--_Ab. Op._, pars II, ep. XVI, p. 301.]
[Note 322: "Qui novi haeretici calomniis studeant obviare." (_Id.,
ibid._)]
[Note 323: Gaufrid., _In Vit. S. Bern._--S. Bern. _Op._, vol. 1, p.
636.]
Telle etait la lettre immediatement ostensible. Une lettre plus courte,
portant la meme suscription, et donnee le lendemain de la precedente,
contenait le commandement que voici:
"Par les presents ecrits, nous mandons a votre fraternite de faire
enfermer separement dans les maisons religieuses qui vous paraitront le
plus convenables, Pierre Abelard et Arnauld de Bresce, fabricateurs de
dogmes pervers et agresseurs de la foi catholique, et de faire bruler
les livres de leur erreur partout ou ils seront trouves. Donne a Latran,
18ieme jour des calendes d'aout."
Et a cette lettre etait annexe cet ordre:
"Ne montrez ces ecrits a qui que ce soit, jusqu'a ce que la lettre meme
(sans doute le rescrit principal) ait ete, dans le colloque de Paris qui
est tres-prochain, communiquee aux archeveques[324]."
[Note 324: Cet ordre est du 14 juillet. On ignore quel etait le but
de ce colloque (conference ou deliberation) qui devait se tenir a Paris
et ou devaient assister des archeveques, je n'en ai vu trace ni dans la
_Gallia Christiana_, ni dans l'_Histoire de l'Eglise de Paris_ du P.
Gerard Dubois. (S. Bern. _Op._, ep. CXCIV et not. in ep. CLXXXVII
et seqq., p. lxvi.--_Ab. Op._, pars II, ep. XV et XVI, p. 299 et
301.--Fleury, _Hist. Eccl._, t. XIV, l. LXVII, p. 556.)]
Le secret prescrit fut garde quelque temps. Abelard parait n'avoir ni su
ni soupconne de bonne heure ce fatal denoument. En faisant son appel, il
avait entendu se retirer par devers la Cour de Rome, pour y plaider sa
cause. Il ne pouvait s'imaginer qu'on l'y jugerait sans l'entendre, et
que cette iniquite, presque sans exemple de la part de l'Eglise supreme,
serait consommee contre lui. Il faut remarquer en effet, qu'a aucune
epoque de la procedure, soit en France, soit en Italie, il n'a ete ad
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