t ce qui occupait
l'autre. La plus recente n'a pas ete aussi etroite, aussi exclusive
qu'on l'imagine. Elle l'a ete dans sa forme; et c'est par la qu'elle
s'est compromise. Elle a fait passer la science sous une forme
exceptionnelle, et, par la, elle en a restreint et surtout dissimule
l'universalite.
La philosophie, au XIIe siecle, s'appelait ordinairement la dialectique.
On donnait a ce mot un sens analogue a celui qui a prevalu dans
le commun usage. La dialectique etait l'art logique ou la logique
appliquee. Les anciens l'avaient souvent entendu autrement. La
dialectique de Platon est la recherche de ce qu'il y a de general dans
le particulier, d'absolu dans le relatif, la recherche de l'ideal
scientifique[365]. C'est une methode ascendante qui, de nos perceptions
diverses ecartant le multiple, le changeant, l'individuel, remonte a
l'essence, au permanent, a l'un. C'est une analyse, en ce sens qu'elle
decompose, afin d'elaguer l'accessoire et d'atteindre le principal ou
ce qui subsiste de chaque chose dans la raison eternelle; c'est une
synthese, en ce sens que, des phenomenes complexes et variables, elle
semble former, par la vertu de l'intelligence, quelque chose qui n'est
aucun phenomene. Prise comme instrument logique, elle serait l'art de
la definition, puisqu'elle est la recherche de l'essence. C'est cette
dialectique que les alexandrins emprunterent a Platon et amenerent a la
rigueur d'un procede scientifique[366]. Ce procede se retrouve dans la
philosophie moderne, et quelques-uns de ses caracteres subsistent, par
exemple, dans la dialectique d'Hegel[367]. Mais bien qu'il soit surtout
cher a Platon, il n'etait pas ignore d'Aristote, car c'est le procede de
la science de l'etre, de la science de l'universel, de la metaphysique
en un mot[368]. Le Stagirite n'admit pas toutes les consequences
auxquelles cette methode conduisait Platon; mais il la connut, il sut
meme la pratiquer parfois, quoiqu'il reservat le nom de dialectique pour
cette partie de la logique qui ouvre la route de toutes les sciences en
discutant les principes, et trouve un procede syllogistique pour traiter
un sujet donne en partant des propositions les plus probables[369]. Mais
pour lui la dialectique etait loin d'etre toute la philosophie. Il dit
meme qu'elle lui est opposee, s'appuyant sur l'apparent, tandis que la
philosophie s'appuie sur la verite[370]. Dans les mains des stoiciens,
la logique, niant ou du moins attenuant la verite du gen
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