nous n'avons fait qu'inventer une autre maniere
de la rendre partielle et sterile. Je le conteste, mais j'avoue qu'il
est tres-commun de ne point depasser la psychologie; de tres-habiles
gens n'ont pu en sortir ou meme ont fini par n'en pas vouloir sortir.
L'ecole ideologique a tremble de faire un pas hors du cercle de la
sensation. Il y a beaucoup a redire aux limites scientifiques que les
Ecossais ont elevees et qu'ils ont interdit a l'observation de franchir.
Jouffroy n'a pas completement reussi, malgre d'ingenieux et opiniatres
efforts, a se delivrer du joug etroit de l'observation subjective de la
conscience; et quoiqu'il proteste, Kant lui-meme n'a fait que rendre
plus profonde, mais non plus penetrable, l'impasse de la psychologie. On
ne saurait donc s'etonner que, renfermes dans un point de vue bien plus
retreci pour embrasser l'horizon (car la logique est dominee par la
psychologie), les scolastiques aient eu beaucoup de peine a parcourir
l'ensemble de la carte scientifique. S'ils ont encore beaucoup vu, ils
n'ont pas vu sous un angle vrai; ils n'ont pas donne aux objets les
dimensions, les contours et les teintes de la verite. Mais du moins
ont-ils connu tout ce qu'on peut connaitre, lorsqu'on n'est initie a la
science que par la dialectique.
Nous n'ecrivons pas leur histoire. Il faut donc poser simplement
comme un fait qu'apres l'invasion definitive du christianisme et
le refoulement successif des ecoles de philosophie paienne, qui se
refugierent et s'eteignirent dans le cercle encore brillant mais sterile
des ecoles alexandrines, les hommes superieurs qui, dans l'Occident a
partir du VIIe siecle, s'efforcerent de dissiper les tenebres de la
barbarie, n'eurent pour flambeau que la lueur pale des commentaires de
la philosophie antique; et parmi les interpretes qui la transmirent au
moyen age, dominerent les commentateurs de la Logique d'Aristote.
Les anciens avaient trouve les sciences et les lettres. On recevait
d'eux les unes et les autres avec une curiosite, une admiration et une
confiance egales. On les imitait en tout, excepte dans la liberte
de leur genie. Toute doctrine se convertissait donc en erudition.
Comprendre, traduire, interpreter, paraphraser, telle etait, en general,
l'oeuvre de ces esprits nobles et malheureux qui se souleverent
au-dessus de l'ignorance et de la grossierete universelles, dans ces
contrees depouillees de toute nationalite par la double conquete des
legions romaines et des h
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