n est
extraite d'une lettre ecrite aux moines de Richenon contre un certain
Ekkcher qui lui avait reproche une faute de grammaire. La lettre,
violemment satirique, annonce une certaine erudition. (Dur. et Mart.,
_Ampliss. Coll._, t, I, p. 305.--_Hist. litt._, t. VI, p. 386.)]
Les controverses de la periode suivante furent plus theologiques que
dialectiques. La transsubstantiation devint le point litigieux entre
Berenger et Lanfranc de Pavie. Berenger controlait par la dialectique le
dogme de l'eucharistie, et, niant la presence reelle, il ecartait les
substances, pour ne voir que des mots au sens relatif et non direct,
dans les paroles sacramentelles: _hoc est corpus meum_. C'etait
un nominalisme special ou restreint a une seule question, et la
condamnation de Berenger par le concile de Soissons concourut a donner
couleur d'heresie a toute doctrine dans laquelle percait l'esprit qui
devait changer le conceptualisme en nominalisme.
Cependant cet esprit anima Jean le Sourd, que suivaient Arnulfe de
Laon et Roscelin, chanoine de Compiegne. C'est celui-ci qui donna au
nominalisme et sa forme derniere, et peut-etre son nom. Il eut pour
adversaire Anselme, abbe du Bec, puis archeveque de Cantorbery.
Nous verrons, dans Abelard, combien fut absolu le nominalisme de
Roscelin. Il disait que les individus seuls avaient l'existence, et que
par consequent les genres etaient des mots; et non-seulement les genres
et les especes, mais les qualites, puisqu'il n'y a point de qualite
hors de l'individu; et non-seulement les qualites, mais les parties,
puisqu'il n'y a point de parties hors des _touts_ individuels, et que
l'individu, c'est-a-dire le tout individuel, est seul en possession de
l'existence. Cette idee, toute dialectique, appliquee au dogme de la
Trinite, mene a considerer les personnes divines comme des especes, des
qualites ou des parties, et consequemment comme des voix, si elles
ne sont trois choses individuelles. Aussi le nominalisme exposa-t-il
Roscelin a l'accusation de tritheisme.
Saint Anselme, son puissant adversaire, se jeta par opposition dans
l'exces du realisme. Non-seulement il defendit le dogme de la Trinite
contre l'atteinte des distinctions dialectiques, mais il crut trouver
l'origine _des blasphemes de Roscelin_ dans sa doctrine logique, et il
l'accusa tour a tour de tritheisme et de sabellianisme, montrant
qu'il fallait ou qu'il admit trois dieux differents, ou qu'il niat la
distinction des trois per
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