ussete necessaire; et quant a la verite
de fait d'une proposition, elle ne commence a etre necessaire qu'alors
qu'elle a acquis la verite reelle. Un homme mourra, et s'il meurt,
necessairement il ne sera pas non mort; c'est une necessite
conditionnelle. Dans les choses, si l'evenement arrive, le non-evenement
sera necessairement faux. Dans la proposition, si elle est vraie, la
negation de la proposition sera necessairement fausse. Mais ni la
realite de l'evenement, ni la verite de la proposition n'est necessaire.
La theorie logique ne porte donc aucune atteinte a l'existence des
futurs contingents, non plus qu'a celle du libre arbitre. Dieu sait bien
si l'evenement arrivera, si la proposition est vraie; mais il n'a pas
mis l'avenir sous la loi de la necessite; et la condition du libre
arbitre est a cote de la prescience. _Non omnis res_, dit saint Anselme,
_est neceasitate futura, sed omnis res futura est necessitate futura....
has necessitates facit volontatis libertas_[489].
[Note 489: S. Ans. _Op., De Concord. praescient. cum lib. arb._ Qu.
I, c. III, p. 124.]
La discussion a laquelle se livre Abelard est donc bonne et concluante,
encore que technique et subtile. Nous verrons qu'elle avait pour lui une
grande importance, et qu'il y revient avec une nouvelle sollicitude dans
sa theologie. La, en effet, est une grave question de theodicee.
On remarquera seulement qu'ainsi que nous l'avons annonce, la logique
offre dans son cours des questions qui la depassent et qui interessent
les parties les plus elevees de la philosophie. Tout n'est donc pas
science de mots dans la dialectique. Au reste, nous recueillons ici une
des premieres expressions de cette theorie des futurs contingents, un
des points les plus celebres et les plus importants de la scolastique.
Le germe de la doctrine d'Abelard est dans Aristote. Les details sont
pour la plupart empruntes a Boece, qui a longuement traite la question
sans toujours l'eclaircir; mais la discussion, bien que peu originale,
est forte et subtile, et l'on doit maintenant comprendre comment une
question qui interesse le libre arbitre, et par consequent la morale; la
providence divine, et par consequent la theodicee; l'action de Dieu sur
l'homme, et par consequent la religion; la grace et la volonte, et par
consequent le christianisme, a pu se trouver tout entiere dans cette
simple question logique: Dans les jugements particuliers et futurs,
l'affirmation et la negation sont-elles
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