ue les
terminologistes, qui pourrait dire qu'ils doivent etre mis hors la
philosophie? Seraient-ce les ideologistes, eux qui par le choix de
ce nom ont temoigne de leur soin a s'abstenir, a s'ecarter de toute
ontologie, et qui, grammairiens avant tout, en inventant ce mot
_ideologie_, sont restes en arriere de leur veritable doctrine, et ont
retenu le nom de la science en deca des consequences qu'ils lui avaient
fait reellement atteindre? Qui mieux qu'eux-memes avait, en effet,
compris que l'expression tenait a la pensee? En se fondant sur la
necessite ou nous sommes de jouer aux mots pour jouer aux idees, c'est
eux qui ont ramene la science au langage. Consequents et sinceres, eux
aussi, ils auraient pu appeler la philosophie du nom de terminologie.
Quant aux ontologistes, seraient-ils donc les seuls philosophes?
Depuis que le _Discours de la methode_ a paru, cela serait difficile a
soutenir; car le procede ontologique, au sens ou nous l'avons defini,
a ete presque generalement abandonne, et peut-etre meme decrie outre
mesure. D'ailleurs, il est impossible a celui qui s'attache le plus
aux choses de ne pas s'occuper au moins implicitement de l'etude et du
classement des pensees. Ce sont deux operations inseparables l'une de
l'autre, et toutes deux sont inseparables d'un travail sur les mots.
D'ordinaire, celui qui fait une decouverte reforme la langue, et
l'observation neuve d'un phenomene sensible de la nature aboutit a une
innovation dans les termes. La decouverte du principe de toute la chimie
moderne pouvait presque se reduire a une meilleure definition du mot
_combustion_.
Dans la philosophie proprement dite, l'ontologie influe d'une maniere
encore plus notable et plus directe sur le langage. Tout auteur de
systeme cree necessairement sa langue, et pretend de nouveau marquer a
son coin la monnaie usee des termes vulgaires. Il arrive meme un fait
assez frappant, quoique tres-explicable, c'est que les philosophes qui
ont le moins pense aux mots en ont le plus abuse; dans le fait, ils
n'ont pas ete les moins sujets a se laisser conduire et tromper par
le langage. Les philosophes grecs, par exemple, ceux surtout qui ont
precede l'ecole de Socrate, ont manie la langue avec une liberte qui les
a souvent egares, et a force de negliger l'analyse soit des mots,
soit des idees, ils ont parfois, avec des idees confuses et des mots
equivoques, construit le mensonge ontologique des cosmologies de
l'antiquite. Faute de se t
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