e si j'ai dit quelque chose contre la personne de
l'homme de Dieu, j'entends que le lecteur le prenne en plaisanterie, et
non au Serieux."
[Note 319: _Ab. Op._, pars II, ep. XIX, p. 325.]
[Note 320: "Quia, etsi sanum saperent, non sane sonabant." (_Ab.
Op._, pars II, ep. XVIII, p. 822.)]
C'est que le jugement du pape, qui d'abord n'avait que transpire, fut
bientot officiellement connu, et mit fin a cette grande controverse,
qui devait renaitre un jour sous les auspices d'hommes nouveaux. Saint
Bernard avait triomphe; l'oeuvre etait consommee. On ignore si la cour
de Rome hesita, si elle fut quelque temps combattue entre les deux
partis; mais l'acquittement d'Abelard etait la condamnation du clerge
de France et l'immolation dans l'Eglise de ce qu'on pourrait appeler
le parti gouvernemental au parti liberal. Un tel acte ne pouvait etre
qu'une dangereuse inconsequence, a moins qu'il ne fut le debut et le
signal d'un systeme nouveau, et ne figurat dans un vaste ensemble de
mesures de reforme ou tout au moins de conciliation. Or cette politique
n'etait pas dans les idees du siecle, peut-etre meme eut-elle devance
de trop d'annees la necessite qui plus tard a pu la reclamer sans
l'obtenir. En tout cas, elle n'etait pas a la portee de celui qui, sous
le nom d'Innocent II, gouvernait l'Eglise, esprit mediocre et d'une
commune prudence, imitateur timide de la politique illustree, entre ses
predecesseurs, par Hildebrand, et entre ses successeurs, par Lothaire
Conti. Peu de mois apres le concile de Sens, un rescrit donne a Latran
le 16 juillet, et adresse aux archeveques de Sens et de Reims,
ainsi qu'a l'abbe de Clairvaux, condamna sur l'appel Abelard et ses
doctrines[321]. Les termes en sont assez moderes. Apres un preambule
sur les droits et les devoirs du saint siege, et quelques citations
d'erreurs deja condamnees, le pape, sans se prononcer en droit touchant
les operations du concile, dit que, quant aux articles deferes par
les deux archeveques, il a reconnu avec douleur, dans la pernicieuse
doctrine de Pierre Abelard, d'anciennes heresies, et qu'il se felicite
qu'au moment ou se raniment des dogmes pervers, Dieu ait suscite a
l'Eglise des enfants fideles, au saint troupeau d'illustres pasteurs,
jaloux de mettre un terme aux attaques du nouvel heretique[322]. En
consequence, apres avoir pris le conseil de ses eveques et cardinaux, le
successeur de saint Pierre condamne les articles ainsi que la doctrine
generale de Pi
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