u roi, qui les crut trop legerement, defendit de leur faire
aucun mal, et leur permit de marcher en corps avec l'armee. Un jour
qu'ils crurent avoir trouve l'occasion favorable, ils attaquerent
les Templiers, dont la brigade marchait a la tete de l'armee; ils
renverserent un de leurs chevaliers aux pieds du marechal Renaut
de Bichers: mais ceux-ci s'etant mis en defense, les chargerent si
vigoureusement que pas un seul de ces traitres n'echappa. Ils furent
tous pris, tues ou noyes en voulant traverser le fleuve. Les Sarrasins
firent encore quelques tentatives, et il est parle dans leurs histoires
d'un combat ou l'un de leurs emirs, appele Magelas, fut tue, avec
beaucoup de perte de leur part, et tres-peu du cote des chretiens.
Le roi etant arrive a la pointe qui separe les deux bras du Nil, s'y
arreta et y etablit son camp, tant pour y faire reposer l'armee, que
pour deliberer sur la maniere dont on pourrait passer le bras oriental
de la riviere, qu'on appelait alors le Thanis, parce que l'armee du
soudan etait campee fort proche de l'autre cote, a peu de distance d'une
ville appelee Massoure.
L'armee du soudan etait tres-nombreuse, toutes les forces de l'Egypte
s'y etant rassemblees, sur les nouvelles de l'approche de l'armee des
croises, qui avait repandu la terreur dans tout le pays; de sorte que,
dans la grande mosquee du Caire, on exhorta tous les Musulmans a prendre
les armes pour la defense de la religion mahometane, qui n'avait jamais
ete dans un plus grand peril.
Les premiers exploits qu'on avait vu faire aux Francais a leur
debarquement, la perte de Damiette, la maladie du soudan qui augmentait
tous les jours, etaient pour les Mahometans de terribles presages de ce
qu'ils avaient a craindre d'une armee victorieuse, a laquelle rien ne
paraissait impossible; et ils voyaient bien que si elle passait une fois
le Thanis, tout etait perdu. Ces motifs obligerent le soudan de faire
des propositions de paix qui paraissaient si avantageuses, qu'il
semblait qu'on ne pouvait les rejeter. Il envoya proposer au roi de le
mettre en paisible possession de tout ce qu'avaient possede autrefois
les rois de Jerusalem, de donner la liberte a tous les chretiens captifs
dans son empire, et meme de lui laisser Damiette avec ses environs.
Ces offres etaient en effet telles qu'on n'eut pas balance pour
les accepter, si l'on eut pu s'assurer de l'execution; mais cette
incertitude, et les difficultes qu'on y prevoyait, les firent
|