s n'etaient pas en etat de tenter une
troisieme attaque, et on ne voulut pas qu'une retraite leur donnat lieu
de s'attribuer l'avantage du combat. Vanite ridicule; l'honneur des
Francais etant assez a couvert par les actions courageuses qu'ils
avaient faites. Ils determinerent donc le roi a consentir de rester dans
le camp, apres lui avoir encore represente que, dans leur retraite, ils
pourraient etre attaques par les Sarrasins. Cette resolution fut blamee
par beaucoup de personnes; mais ce ne fut que dans la suite, lorsqu'on
en jugea par l'evenement, sans approfondir les raisons qui avaient
oblige de la prendre. Elle aurait sans doute reussi, sans la funeste
revolution qui arriva dans l'Egypte, quelques jours apres, et causa les
plus grands malheurs.
Pendant que le roi faisait reposer son armee, dont il adoucissait les
peines par ses liberalites et par les exemples de patience qu'il
lui donnait, on apprit l'arrivee d'Almoadan, fils du dernier soudan
Melech-Sala. C'etait un jeune prince de vingt-cinq ans, fort sage,
instruit par l'adversite, qui avait deja de l'experience, et dont le
merite ayant donne de la jalousie a son pere, le lui avait fait
tenir toujours eloigne, et comme prisonnier au chateau de Caifa, en
Mesopotamie. Sa presence, les bonnes qualites qu'on remarquait en
sa personne, l'armee qu'il conduisait, firent reprendre courage aux
Egyptiens, et il paraissait, dans les soldats musulmans, un grand
empressement pour aller, sous sa conduite, achever d'exterminer ce reste
de chretiens dont on n'ignorait pas la mauvaise situation.
Neanmoins ce jeune prince, ayant pris l'avis de son conseil, jugea que
la voie d'un traite etait plus sure, et en fit faire la proposition au
roi qui l'accepta. On convint d'un lieu ou les deputes s'assembleraient,
et le roi y envoya, entr'autres, Geoffroi de Sargines.
On convint que le roi rendrait la ville de Damiette, et que le soudan
le mettrait en possession de tout le royaume de Jerusalem; que tous les
malades et blesses de l'armee seraient transportes a Damiette; qu'on y
pourvoirait a leur surete jusqu'a ce qu'ils fussent retablis, et en etat
de partir; que le roi en retirerait toutes les machines de guerre qui
lui appartenaient; que les Sarrasins laisseraient emporter aux Francais
tous les magasins de chair salee qu'ils y avaient faits, et qu'ils
pourraient, apres avoir evacue la place, en tirer des provisions a un
prix raisonnable.
Quand ce traite eut ete conclu, le so
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