soit
fidelement execute; que les femmes publiques soient chassees tant des
villes que de la campagne. Il defend, sous peine _d'etre repute infame
et deboute de tout temoignage de verite_, non-seulement de jouer aux
des, mais meme d'en fabriquer dans toute l'etendue de ses domaines; il
enjoint de punir severement ceux qui tiennent des academies de jeu. Il
proscrit meme jusqu'aux echecs, qui ne passent aujourd'hui que pour un
simple jeu d'esprit, mais qui pouvait peut-etre alors entrainer des
inconveniens que nous ignorons.
Pour ce qui est de l'article des presens qu'on defend aux juges de
recevoir, ce projet d'ordonnance, si nous en croyons le sire de
Joinville, fut concu a l'occasion qu'il rapporte, des le temps que le
roi debarqua en Provence.
L'abbe de Cluny etait venu saluer ce prince pour lui faire son
compliment sur son retour; il lui fit present de deux tres-beaux
chevaux. Le lendemain il demanda audience au roi, qui la lui donna
longue et favorable. Apres cette audience, Joinville, avec cette
familiarite que le roi lui permettait, lui demanda s'il repondrait
franchement a une question qu'il voulait lui faire; le roi le lui
promit.
"N'est-il pas vrai, sire, reprit Joinville, que les deux beaux chevaux
que vous a donnes l'abbe de Cluny, lui ont merite la longue audience
dont vous l'avez honore? Cela pourrait bien etre vrai, lui repondit le
roi. He bien, sire, continua Joinville, defendez donc aux gens de votre
conseil de rien prendre de ceux qui ont affaire a eux; car soyez
certain que s'ils prennent, ils en ecouteront plus diligemment et plus
longuement, ainsi qu'avez fait de l'abbe de Cluny." Le roi se mit a rire
de la reflexion de Joinville, et en fit rire son conseil, qui lui dit
que l'avis etait sage, et qu'il fallait le mettre a execution. C'est ce
qu'il fit par l'ordonnance dont je viens de parler. Heureux les princes
qui ecoutent la verite en faveur de leurs peuples, et plus heureux les
peuples qui sont gouvernes par de tels princes!
Le roi, non content de publier des ordonnances et de recommander a ses
officiers de faire justice, tenait severement la main a l'execution. Un
bourgeois de Paris, ayant ete convaincu d'avoir profere un blaspheme,
il n'y eut ni prieres, ni egards qui pussent flechir le roi. Il fit
executer, sans remission, l'edit publie contre les blasphemateurs, par
lequel ils etaient condamnes a souffrir l'application d'un fer chaud sur
la bouche. Comme plusieurs personnes de la cour
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