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durs, que, pour l'honneur de leurs personnes, on avoit fait peindre par
dehors de diverses couleurs_.
_Le roi est mis en liberte_.
On leur permit ensuite de sortir des vaisseaux qui leur tenaient encore
lieu de prison, et d'aller trouver le roi qu'on avait laisse dans une
tente sur le rivage. Il marchait alors vers le Nil, accompagne de vingt
mille Sarrasins armes, qui le consideraient avec une grande curiosite,
et lui rendaient le meme honneur que s'il eut ete leur prince.
Une galere l'attendait, sans autre equipage, en apparence, qu'un homme
qui faisait le fou. Des qu'il vit le monarque a portee d'etre secouru,
il donna un coup de sifflet, et a l'instant parurent quatre-vingts
arbaletriers francais bien equipes, leurs arbaletes tendues, et le trait
dessus. _Les infideles, a cette subite apparition, commencerent a fuir
comme des brebis, ne oncque avec le roi n'en demeura que deux ou trois_.
Aussitot le maitre du vaisseau lui fit jeter une planche pour l'aider
a passer sur son bord: il y entra suivi du comte d'Anjou son frere,
de Geoffroi de Sargines, de Philippe de Nemours, d'Alberic Clement,
marechal de France, du sire de Joinville, et de Nicolas, general de la
Trinite.
Le roi, suivant le traite fait avec les emirs, devait, avant de partir
d'Egypte, payer le quart de la rancon dont on etait convenu. Il leur
avait deja fait payer la moitie de cette somme, et en attendant qu'on
put trouver le reste, le comte de Poitiers, son frere, etait retenu en
otage par les ennemis. Apres qu'on eut ramasse tout ce qu'on put trouver
d'argent, il se trouva qu'il manquait soixante mille livres pour
completer la somme. Joinville conseilla au roi de les emprunter
des Templiers, ou de les prendre par force s'ils faisaient quelque
difficulte. Leur grand-marechal se piquant d'une fausse exactitude,
refusa de les preter dans l'occasion du monde la plus privilegiee. Il
representa qu'en recevant leurs commanderies, ils faisaient serment de
ne point disposer des revenus de l'ordre sans la permission de leurs
superieurs. On fut outre d'un scrupule si mal fonde de la part de gens
qui ne se dispensaient que trop souvent de leur regle en d'autres points
bien plus essentiels, et de voir qu'ils avaient moins de confiance en la
parole du roi que les infideles.
Le sire de Joinville s'offrit, et partit avec la permission du monarque
pour aller forcer leurs coffres pretendus sacres. Il avait deja la
cognee levee pour les briser, lorsque le
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