t d'abord epargnes,
les font trainer impitoyablement dans les memes prisons, et les traitent
de facon qu'il en mourut plusieurs, soit de misere, soit de l'infection
d'un lieu capable a peine de les contenir. La reine, indignee de cette
insolence et de cette barbarie, ne crut pas devoir respecter des
prerogatives qui degeneraient en abus, et favorisaient la plus horrible
tyrannie. Elle se transporte a la prison, commande d'enfoncer les
portes, donne elle-meme le premier coup, et dans l'instant les portes
sont brisees. On en voit sortir un grand nombre d'hommes, de femmes,
et d'enfans pales et defaits. Tous se jettent aux pieds de leur
bienfaitrice et reclament sa protection. Elle la leur promit et tint
parole. Les biens du chapitre furent saisis, moyen toujours efficace
de reduire les plus mutins sous le joug de l'autorite legitime. Les
chanoines, plus dociles, consentirent enfin d'affranchir ces malheureux,
moyennant une somme payable tous les ans.
Comme le but principal de la regente etait d'entretenir la tranquillite
dans l'etat, elle etait surtout attentive a la maintenir dans la
capitale. La licence des pastoureaux, dont j'ai parle a l'occasion de la
prison du roi, avait laisse parmi le peuple de certaines dispositions a
s'emanciper. Ce fut sans doute par ce motif qu'elle exigea de nouveaux
sermens de fidelite des bourgeois de Paris, et qu'elle obligea
l'universite de faire un statut par lequel tout ecolier qui serait pris
arme pendant la nuit, serait juge par le juge ordinaire, nonobstant les
privileges de ce corps. La reine avait encore, quelque temps auparavant,
fait declarer par le pape que tous les ecoliers de l'universite, qui
seraient trouves portant des armes, seraient exclus de tous privileges.
C'etait un point de police tres-important, parce qu'alors les ecoliers
n'etaient pas des enfans comme aujourd'hui, mais des hommes faits, pour
la plus grande partie, qui, par leur nombre et par la diversite et la
jalousie des nations, pouvaient causer de grands desordres, dont on
avait vu de facheux exemples sous les regnes precedens. Telle etait la
situation des affaires dans le royaume de France.
Saint Louis etait occupe dans la Palestine a y faire construire des
forteresses pour mettre les chretiens en etat de se soutenir contre les
infideles, lorsqu'il recut la triste nouvelle de la mort de la reine
Blanche sa mere.
_Mort de la reine Blanche_.
Cette princesse fut attaquee a Melun, dans le mois de novembre
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