tot mis en liberte,
qu'ils partagerent entre eux les captifs qui furent traites avec la
derniere barbarie. Cette conduite des Egyptiens fit changer de face aux
affaires.
_Louis demande l'avis des seigneurs sur son retour en France_.
Louis, vivement sollicite par les prieres de la reine sa mere, avait
resolu de retourner en France, ou l'on n'avait ni paix, ni treve avec le
roi d'Angleterre. On commencait a craindre qu'il ne voulut profiter de
l'eloignement du monarque; car on connaissait la jalousie, l'ambition,
la cupidite et l'humeur inquiete de Henri; mais, d'un autre cote, la
retraite du saint roi entrainait celle de tous les croises qui ne
pouvaient manquer de le suivre, et desiraient, apres tant de malheurs et
de fatigues, de revoir encore leur patrie. Les Templiers meme, et les
Hospitaliers, menacaient de s'embarquer avec lui, s'il prenait le parti
de les abandonner. Ainsi la Palestine demeurait sans defense, ses
habitans sans ressource, plus de dix mille prisonniers sans esperance
d'etre rachetes.
Dans cette position difficile, il assembla les comtes de Poitiers et
d'Anjou, le comte de Flandre, et tous les seigneurs de l'armee.
"Madame la reine, ma mere, leur dit-il, me mande que mon royaume est
dans un grand peril, et mon retour tres-necessaire. Les peuples de
l'Orient, au contraire, me representent que la Palestine est perdue si
je la quitte, me conjurent de ne les point abandonner a la merci des
infideles, protestent enfin qu'ils me suivront tous, si je veux les
laisser a eux-memes. Ainsi je vous prie de me donner votre avis sur ce
qu'il convient de faire: je vous donne huit jours pour y penser." Il ne
lui echappa dans son discours aucune parole qui put faire connaitre son
dessein; mais la gloire de Dieu, l'interet de la religion, sa tendresse
pour des sujets malheureux qui gemissaient dans un dur esclavage, ne
lui permettaient pas de balancer sur le choix du parti qu'il avait a
prendre.
Quand les huit jours furent expires, l'assemblee se trouva encore plus
nombreuse que la premiere fois. Alors le seigneur Guy de Mauvoisin lui
dit, au nom de tous les seigneurs francais: "Sire, messeigneurs vos
freres et tous les chefs de votre armee sont d'avis que vous vous
embarquiez au plus tot. Votre royaume a un besoin pressant de votre
presence. Vous ne pouvez demeurer ici avec honneur. Le sejour que vous y
ferez ne sera d'aucune utilite. De deux mille huit cents chevaliers qui
vous accompagnaient en partant d
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