ner."
Son ideal, c'est Frederic II; non pas encore: Frederic accueille et
recueille les Jesuites; son vrai ideal, c'est Catherine II. La societe
qu'il a revee c'est celle de Napoleon Ier.
Et ce systeme est un systeme. C'est celui de Hobbes. Seulement Voltaire
est trop leger pour avoir en soi, ou pour atteindre, du systeme qu'il
concoit ou qu'il caresse, la substance et le fond. Il n'appuie sur
rien les constructions legeres de sa pensee. Positiviste, il n'a pas
l'essence du positiviste; monarchiste, il n'a pas la raison d'etre du
monarchiste; antidemocrate, sans etre serieusement aristocrate, il n'a
pas les qualites patriciennes; et, conservateur, il n'a pas les vertus
conservatrices.
Positiviste, il ne sait pas que l'essence du positivisme c'est une
qualite, tres religieuse, quoi qu'elle en ait et tres grave, qui est
l'humilite; que le positiviste sincere est surtout frappe des bornes
etroites et des voutes affreusement basses et lourdes qui limitent
et repriment notre miserable connaissance; qu'il dit: "Bornons-nous,
puisque nous sommes bornes; sachons ne pas savoir, puisqu'il est si
probable que nous ne saurons jamais; a l'_ama nesciri_ de l'_Imitation_
ajoutons _aude nescire_";--et que c'est la une disposition d'esprit
plus respectueuse du grand mystere que toute temeraire affirmation,
puisqu'elle le proclame.--Voltaire, lui, ne s'humilie point, croit
savoir (le plus souvent du moins) et tranche lestement. Il est
positiviste assure et audacieux, avec un petit deisme tres positif
aussi, sans aucun mystere, dont on fait le tour en trois pas, dont il
est facheux aussi qu'il ait besoin comme instrument de terreur, et qui
au defaut d'etre un peu naivement positif, joint celui d'etre trop
pratique. Il n'a pas le positivisme serieux et reflechi qui s'arrete au
seuil du mystere, mais precisement parce qu'il y est arrive.
Monarchiste, il n'a pas la raison d'etre du monarchiste, qui n'est autre
chose que le patriotisme. Le monarchisme, quand il est profond, est un
sacrifice. Il est l'immolation du droit de l'homme au droit de l'Etat
pour la patrie. Il part de cette conviction que la patrie n'est pas un
lieu, mais un etre, qu'elle vit, qu'elle se ramasse autour d'un coeur;
et que ce coeur, s'il n'est pas un Senat eternel, doit etre une famille
eternelle, une maison royale, une dynastie; que cette maison est le
point vital du pays, languissant parfois (et alors malheur dans le pays,
mais respect encore et fidelite au tron
|