t de surnaturel; donc
_il n'y a pas_ de religion.--Comme il a de la curiosite, qu'il aime le
theatre, et qu'il n'est pas tres rigoureux sur la regle des moeurs, il
n'aime guere une religion hostile a la curiosite, au spectacle et au
libertinage; donc _il ne faut pas_ de religion.--Comme il aime que
le peuple le laisse tranquille, il aime tous les freins qui peuvent
contenir le peuple; donc _il faut_ une religion.--Comme il deteste
les guerres civiles, il a horreur de ce qui en a excite et qui peut en
dechainer encore; donc _il ne faut pas_ de religion, etc.--Le
principe est constant, ce n'est pas sa faute si les consequences sont
contradictoires.
Comme il est grant bourgeois, a demi gentilhomme et ne dans un siecle
ou cette classe peut parvenir a tout, il n'est nullement adversaire de
l'aristocratie dont il sent qu'il est; de la monarchie qui ne laisse pas
de s'etre faite a demi bourgeoise. Remarquez que Louis XIV est son Dieu,
pour les memes raisons qui empechaient Saint-Simon d'aimer Louis XIV. Ce
qu'il aime, c'est "ce long regne de vile bourgeoisie" (Saint-Simon),
ou Colbert, Louvois et Chamillart sont ministres, Moliere, Boileau et
Racine favoris. Remarquez que Louis XV et Louis XVI sont rois de la
noblesse beaucoup plus que Louis XIV, et que c'est pour cela qu'il les
aime moins. Remarquez qu'il se preparait a ecrire une refutation de
Saint-Simon, alors recemment connu, quand il est mort.
Quant a la democratie, pourquoi l'aimerait-il? Il la prevoit niveleuse,
et il est riche; peu litteraire, ou ayant tendresse pour la litterature
mediocre, et il est un fin lettre; bruyante, et il cherit la paix;
aimant mieux les phrases que l'esprit, et il est spirituel et "n'a pas
fait une phrase de sa vie".--Et certes, mieux vaut entrer dans une
aristocratie de gouvernement despotique, c'est-a-dire ouverte au talent,
a la richesse et aussi a la flatterie, qu'etre englouti dans une
democratie peu clairvoyante sur ces divers genres de merite.--Donc Louis
XIV, Catherine, Frederic s'il avait bon caractere, Louis XV s'il voulait
ressembler a Louis XIV. Donc il faut une aristocratie sous un despote,
une aristocratie dont un despote ouvre les rangs pour qui lui
plait.--Mais point de corps privilegies, point de parlements, point
de clerge autonome, ni "deux puissances", ni "trois pouvoirs". A quoi
serviraient-ils qu'a etre des obstacles au gouvernement personnel, sans
profit appreciable pour un homme comme M. de Voltaire; et des lors q
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