ont recu les plus pures lecons d'honneur et de
vertu; aussi ne disons-nous jamais a l'avance qu'une chose est
impossible, par cela seul qu'elle a les probabilites les plus serieuses
contre elle: au contraire, nous savons que tout est possible, meme
l'impossible, alors surtout qu'il s'agit de passion.
--La passion n'est pas la folie, s'ecria M. Haupois-Daguillon.
Assurement, le fou n'a pas la conscience de ses actions, et l'homme
passionne a cette conscience; le fou agit au hasard, sans savoir s'il
fait le bien ou le mal, et l'homme passionne agit en sachant ce qu'il
fait mais trop souvent il n'y a plus ni bien ni mal pour lui, il n'y a
que satisfaction de sa passion; on a dit: "l'homme s'agite et Dieu le
mene", mais il faut dire aussi: "l'homme s'agite et ses passions le
menent." Ou la passion dont monsieur votre fils est possede le
conduira-t-elle? Je n'en sais rien. Je veux esperer avec vous que ce ne
sera pas a ce mariage dont M. Byasson se montre effraye. Cependant, je
dois vous dire que, si cette femme veut se faire epouser, elle est
parfaitement capable d'arriver a ses fins. Je la connais, et je l'ai eue
dans ce cabinet, a cette place meme ou vous etes assis en ce moment,
monsieur,--il adressa ces paroles a M. Haupois-Daguillon--a l'epoque ou
elle etait la maitresse du duc de Carami. Effrayee, elle aussi, de voir
son fils au mains de cette femme qui se faisait alors appeler Hortense
de Lignon, madame la duchesse de Carami vint me trouver comme vous en ce
moment, messieurs; elle me demanda de sauver son fils, car il arrive
bien souvent, trop souvent, helas! que des familles eperdues, qui n'ont
plus de secours a attendre de personne, s'adressent a nous comme a la
Providence, ou plus justement comme au diable. Je ne connaissais pas
alors cette Hortense, ou tout au moins je ne savais d'elle que fort peu
de chose, enfin je ne l'avais vue! Je fis prendre des renseignement sur
elle, et ceux que j'obtins furent d'une telle nature que je
m'imaginai,--j'etais, bien entendu, plus jeune que je ne suis,--je
m'imaginai que si le duc connaissait ces notes, il quitterait
immediatement sa maitresse, si grand que put etre l'amour qu'il
ressentait pour elle.
--Et vous avez toujours ces notes? demanda M. Haupois-Daguillon.
--Je les ai. Vous comprenez que je n'eus pas la naivete de les lui
communiquer tout simplement. Des rapports de police! on ne croit que
ceux qui parlent de nos ennemis; comment un amant epris aurait-il ajoute
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