ant, a
ce que tu sois bien avec ta famille? Au debut, oui, j'aurais pu craindre
que ta famille te separat de moi. Mais maintenant il faudrait que je
fusse une femme sans coeur et meme sans intelligence pour avoir cette
crainte. Est-ce que je ne sais pas, est-ce que je ne sens pas que tu
m'aimes comme je t'aime et que rien ne nous separera? Cette crainte
ecartee, combien d'avantages j'aurais a une reconciliation! Je ne parle
pas d'avantages materiels, ceux-la sont de peu d'importance pour moi.
Mais si jamais ma supreme esperance se realise, si jamais tu me prends
publiquement, legitimement pour ta vraie femme, ce ne sera qu'avec
l'assentiment de ta famille et non malgre elle. C'est donc d'elle que
j'ai besoin, c'est son appui qu'il me faut. Ne sens-tu pas combien
j'aurais ete heureuse que ta mere put apprendre que c'etait moi qui
t'envoyais pres d'elle? Elle m'aurait su gre de ce commencement de
reconciliation, et elle aurait compris que je n'etais pas la femme
qu'elle s'imagine d'apres de faux rapports. Tu vois donc que, loin de te
retenir, j'aurais ete la premiere a te dire d'aller l'embrasser.
--Quand Jacques m'a dit que ma mere etait malade, je n'ai pense qu'a
cette maladie, et je suis parti sans autre reflexion; mais, quand elle
m'a demande de diner avec elle, la pensee m'est venue alors que si tu
pouvais me parler tu me dirais: "Reste".
--Oh! pour cela il faut que je t'embrasse.
Ce n'etait pas la premiere fois que Cara parlait de son mariage, c'etait
peut-etre la centieme; mais toujours elle avait eu grand soin de le
faire d'une facon incidente, en passant, tout d'abord comme d'une idee
folle, puis comme d'un reve irrealisable, puis peu a peu en precisant,
mais de telle sorte cependant que Leon ne put pas lui repondre d'une
facon categorique: cette reponse eut du etre un oui, elle l'eut
bravement provoquee; mais comme a l'embarras de Leon, lorsqu'elle
abordait ce sujet, il etait evident que ce oui n'etait pas pret a venir,
elle n'avait jamais voulu brusquer un denoument qui ne s'annoncait pas
comme devant s'accorder avec ses desirs. Il fallait attendre, patienter,
cheminer lentement sous terre, tendre les fils de la toile qui devait le
lui livrer sans defense, et encore n'etait-il pas du tout certain que
cette heure sonnat jamais. Elle n'insista donc pas plus dans cette
occasion sur cette idee de mariage qu'elle ne l'avait fait jusqu'a
present, et comme si elle n'en avait parle que par hasard, elle passa a
un
|