omme s'il voulait
prononcer un discours, il se tourna a demi vers Madeleine:
--Ma chere enfant, dit-il, je n'ai pas a revenir sur les propositions
que notre ami Byasson a bien voulu te porter en notre nom: nous
souhaitons que tu deviennes notre fille en acceptant de prendre Leon
pour ton mari. Ceci bien entendu, je dois t'expliquer pourquoi nous
n'avons pas cru devoir accueillir cette idee de mariage lorsque Leon
nous en a parle pour la premiere fois. D'abord il faut que tu saches
qu'a ce moment Leon ne nous a pas dit qu'il eprouvait pour toi une
passion toute-puissante, il n'a alors parle que d'un sentiment de vive
tendresse, d'estime, de sympathie, d'affection, et c'est seulement apres
ton depart qu'il nous a avoue cet amour. Cette explication prealable
etait indispensable, car elle te fait comprendre notre reponse. En
principe, nous voulions pour notre fils une femme qui lui apportat une
fortune egale a la sienne. Tu n'avais pas cette fortune, il s'en fallait
de beaucoup, il s'en fallait de tout. Nous ne pouvions donc consentir a
un mariage entre ton cousin et toi. Ce manque de fortune etait le seul
reproche que nous eussions a t'adresser, mais, avec nos idees, il etait
decisif. Et il l'etait d'autant plus que nous ne savions pas, je viens
de te le dire, quelle etait la nature du sentiment que Leon eprouvait
pour toi; nous croyions a une simple inclination, a une affection entre
cousins; c'etait un amour, un amour reel, profond. Aujourd'hui, ma chere
Madeleine, les conditions ne sont plus ce qu'elles etaient alors, et ce
que nous demandons a celle que nous choisissons pour bru, c'est qu'elle
nous ramene notre fils, c'est qu'elle nous le rende, c'est qu'elle le
sauve, lui et son honneur. Cela dit, je dois ajouter que nous ne
renoncons pas entierement a nos idees de fortune pour Leon. Nous les
modifions, voila tout.
Jusqu'a ce moment, M. Haupois avait parle avec une certaine gene; mais,
arrive a ce point de son discours, car c'etait bien un discours, il
reprit toute son aisance. Evidemment il se sentait sur de lui, et
maintenant il avait confiance dans sa parole:
--Ce que nous voulons, c'est que Leon soit dans une belle position; il a
ete eleve pour cette position, il doit l'occuper, et puisque sa femme ne
peut pas lui donner la dot sur laquelle nous comptions, c'est a nous de
fournir ce qu'elle n'apporte pas. Tu es notre niece, il est tout naturel
que nous te dotions. Nous donnerons donc une part de notre maison
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