eureusement pour elle, elle perdit encore cette partie.
Malgre l'apparente confiance de Byasson, il n'etait pas du tout prouve
que Rome prononcat jamais cette nullite.
M. et madame Haupois s'etaient adresses a un personnage influent,
disait-on, et qui deja avait fait prononcer la nullite d'un mariage
conclu entre un banquier allemand et une Francaise; mais ce personnage,
tout en se faisant donner de l'argent, n'avancait a rien, et repondait
toujours que l'affaire etait grave, qu'il fallait attendre, etc.
Impatientee d'attendre, madame Haupois entreprit le voyage de Rome, et,
se jetant aux pieds du pape, elle lui expliqua avec l'eloquence d'une
mere comment son fils avait ete marie. Elle obtint alors qu'une enquete
serait ouverte a l'archeveche de Paris, conformement a la bulle de
Benoit XIV (_Dei miseratione_) et que le resultat en serait transmis a
la sacree congregation du concile qui examinerait la validite de ce
mariage.
Ce fut devant ce tribunal de l'officialite diocesaine que comparurent
Leon et Cara, M. et madame Haupois, Byasson et tous ceux qui avaient eu
connaissance des faits se rapportant a ce mariage; malgre l'habilete de
sa defense, Cara fut convaincue de n'avoir ete en Amerique que pour
eluder la loi canonique et d'avoir trompe l'abbe O'Connor. Comme il
fallait innocenter celui-ci de la legerete avec laquelle il avait
celebre ce mariage, elle fut chargee de toute la responsabilite, et la
nullite fut prononcee.
Aussitot les publications legales furent faites a Noiseau et a Paris, et
tout se prepara pour le mariage de Leon et de Madeleine.
Bien que Cara eut paru subir les conditions qui lui avaient ete imposees
par Byasson, celui n'etait pas sans crainte pour le jour de la
ceremonie. Comment l'empecher d'entrer a l'eglise, et au pied de l'autel
de se jeter entre Leon et Madeleine.
Elle etait parfaitement capable de jouer cette scene melodramatique, et
le souvenir de son discours devant le tribunal lors du proces engage a
propos du testament du duc de Carami prouvait que dans certaines
circonstances elle pouvait tres-bien preferer la vengeance a l'interet.
La peur de ce scandale determina Byasson a aller voir l'ami qu'il avait
a la prefecture de police, de sorte que l'on remarqua pendant la
ceremonie a l'eglise et a la mairie, plusieurs invites a l'air martial,
paraissant assez mal a l'aise dans leurs gants et que personne ne
connaissait.
Rien ne troubla cette double ceremonie, ni le diner
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