ses dossiers et travaillant.
Mais au lieu d'aller l'embrasser dans le cou, comme elle l'avait fait
alors, elle ferma la porte avec bruit, de facon a s'annoncer.
Riolle leva la tete pour voir qui venait le deranger.
--En voila une surprise; on ne te vois plus: tu negliges tes amis, et
quand ils vont chez toi tu n'y es jamais pour eux. On n'a jamais vu
bourgeoise plus rangee.
--J'aime.
--Il me semble que ce n'est pas la premiere fois, et quand cette
indisposition te prenait, elle ne t'empechait pas d'etre convenable avec
tes amis.
--Maintenant c'est autre chose.
--Je m'en apercois.
--Ce n'est pas pour toi que je parle, c'est pour moi.
--Tu t'imagines peut-etre que tu aimes pour la premiere fois?
--Justement; au moins, c'est la premiere fois que j'aime ainsi; il est
vrai que chaque fois que j'ai aime je me suis dit: Celui-la, c'est le
bon, c'est le vrai, ce n'est pas comme le dernier.
--Et tu as toujours trouve au nouveau des merites que l'ancien n'avait
pas ou plus justement n'avait plus.
--Enfin, je t'assure que cette fois, c'est la bonne: tu ne connais pas
Leon, c'est le meilleur garcon du monde, bon enfant, simple, tendre,
affectueux, n'ayant pas d'autre souci, d'autre preoccupation, d'autre
passion que d'aimer. Quand je pense qu'il y a des femmes assez betes
pour prendre comme amants des gens qui ne pensent qu'aux idees ou qu'aux
affaires qu'ils ont dans la cervelle. Pour une femme intelligente, il
n'y a qu'un amant possible: c'est un homme jeune, beau garcon, tendre,
sensible, solide, qui n'ait d'autre affaire en ce monde que d'aimer;--et
voila precisement Leon.
--Mes compliments. Mais alors puisqu'il en est ainsi, me diras-tu ce qui
me vaut ... ce n'est pas plaisir qu'il faut dire maintenant,--me
diras-tu ce qui me vaut l'honneur de ta visite?
--Un conseil a te demander.
--Alors, il n'est pas complet, le jeune, le tendre, le sensible Leon.
--Heureusement, car ce qu'il aurait d'un cote, il le perdrait de
l'autre.
--C'est aimable.
--Laisse donc, tu sais bien que tu n'as jamais ete qu'une tete, drole il
est vrai, mais une simple tete; c'est a cette tete que je m'adresse
aujourd'hui: que penses-tu d'un mariage entre deux Francais contracte a
l'etranger sans le consentement des parents et sans publication?
--Ton mariage n'en est pas un, ca n'est rien, ca n'existe pas aux yeux
de la loi.
--De votre loi.
--Il n'y en a qu'une en France, c'est celle qui est contenue dans le
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