moi. C'etait une
epreuve, elle eut ete telle qu'il ne serait plus reste de doute apres.
Si tu avais ete chez ton pere, je serais peut-etre morte, mais
qu'importe la mort, c'est la fin. Au contraire, si tu etais revenu pres
de moi, librement, quelle joie! Tu veux me dire que tu es venu, cela est
vrai, mais tu es venu, tu l'as reconnu tout a l'heure, parce que Louise
t'a ecrit que j'etais en danger. Il n'y a pas eu lutte dans ton coeur;
il n'y a pas eut choix. Et c'etait sortir triomphante de cette lutte que
j'aurais voulu. C'etait ce choix qui aurait calme mes alarmes. Tu es
accouru apres avoir lu la lettre de Louise, la belle affaire en verite
chez un homme tel que toi qui est la bonte meme! Pitie n'est pas amour.
Aussi je veux que tu retourne chez ton ami Byasson, non tout de suite,
mais demain, apres-demain, il reprendra son preche ou il a ete
interrompu, et tu decideras en connaissance de cause, librement.
Il arrive bien souvent qu'on ne permet une chose que pour la defendre.
Leon, devant retourner chez Byasson pour faire un choix entre sa famille
et sa maitresse, n'y retourna pas, car y aller eut ete avouer qu'il
pouvait etre indecis, et que la lettre de Louise l'avait precisement
arrache a cette indecision.
Quant a la facon dont cette lettre lui etait parvenue, il en avait eu,
meme sans la demander, l'explication la plus simple et la plus
naturelle: dans sa crise, Cara avait prononce plusieurs fois, sans en
avoir conscience, le nom de Byasson, et Louise, perdant la tete, avait
imagine qu'il fallait envoyer chez ce monsieur dont elle avait trouve
l'adresse dans le _Bottin_.
Byasson, ne voyant pas Leon revenir bientot comme celui-ci en avait pris
l'engagement, lui ecrivit; mais Leon ne recut pas ses lettres qui furent
remises a Louise par la concierge, et par Louise a Cara; alors il vint
lui-meme rue Auber, mais il eut beau sonner, sonner fort, on ne lui
ouvrit pas. Il sonna a la porte de Cara, Louise lui repondit que madame
etait a la campagne. Il revint le lendemain; le concierge, sans le
laisser monter, l'arreta pour lui dire que M. Leon Haupois etait en
voyage; quelques jours apres on lui fit la meme reponse.
C'etait evidemment un parti pris; le mieux dans des conditions etait
donc de ne pas brusquer les choses; il etait plus sage d'attendre, de
veiller et de saisir une occasion favorable quand elle se presenterait;
ce qui devait arriver un jour ou l'autre.
Cara eut alors toute liberte de pratiquer su
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