le, l'universalite de la substance est dans
le fait, est actuellement la totalite des substances.
Chaque substance a une essence, c'est-a-dire une nature stable qui se
reconnait a ses attributs permanents et invariables, et nous avons
raison de croire a l'essence. Ainsi, pour prendre l'exemple toujours
cite, il y a une essence qui s'appelle legitimement la nature humaine.
Elle ne peut etre confondue avec aucune autre, ni produite de toutes
pieces par aucune operation humaine, ni modifiee dans ses elements
constitutifs, sans etre detruite. _Substantialis differentia abesse non
potest, quin corrumpat_[129].
[Note 129: _De Intellect_., p. 492.]
L'idee d'essence est une idee necessaire de l'esprit humain, et l'idee
d'essence est vraie et legitime, non-seulement fondee sur quelque chose
de reel et d'objectif, mais conforme dans une certaine mesure a cette
realite objective, parce que les idees necessaires expriment les
conditions memes de la realite. Mais pour etre conforme a la realite,
cette idee ne lui est point adequate, parce que notre connaissance,
certaine dans ce qu'elle a de necessaire, est toujours et necessairement
incomplete.
L'essence est une condition de l'etre. Mais cette condition qui ne peut
etre ni eludee, ni alteree, ni reproduite a volonte, cette loi qui n'est
expliquee par aucun phenomene naturel, par aucune des forces connues ou
appreciables, ou meme supposables de la nature, est un des temoignages
les plus certains a mes yeux de l'intervention d'une puissance et d'une
intelligence supremes. Pour exister, il faut que l'essence ait ete
concue et voulue. C'est par la que je l'eleve au-dessus meme de ce
qu'il y a de plus eleve en ce monde, les idees necessaires de la raison
humaine. C'est en ce sens que je suis pret a reconnaitre le dogme
platonicien, et a nommer l'essence une idee de Dieu.
LIVRE III.
DE LA THEOLOGIE D'ABELARD.
CHAPITRE 1er.
DE LA THEOLOGIE SCOLASTIQUE EN GENERAL.--CARACTERE DE CELLE
D'ABELARD.--LE _Sic et Non._
On dit que le moyen age fut l'empire romain du christianisme. C'est
alors, suivant des autorites qui s'accordent peu sur d'autres points,
que l'esprit catholique a le plus profondement penetre dans les
institutions, les sciences, les sentiments et les coutumes. De la
l'unite et la grandeur, l'ignorance et la tyrannie assignees tour a tour
comme caracteres a cet age de l'humanite. Accusations ou louanges, il y
aurait beaucoup a rabattre, et l'on montrera
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