coup salue un grand alieniste, qui quelquefois
n'est qu'un chirurgien. Cela, un peu arbitrairement, et attribuant a un
"petit fait" un grand evenement dont il pourrait faire remonter la cause
a un grand homme. Il passe d'un systeme a l'autre. Son histoire en
devient comme bariolee. Tantot elle n'est, comme il y tient, qu'un etat
de moeurs, coutumes, usages, croyances, superstitions, manies d'un
peuple en un temps; tantot elle est, comme il y tient aussi, ramassee
autour d'un grand prince, et, pour ainsi dire, en lui.--Curieux esprit,
souple et fuyant, insaisissable, clair a chaque page, et, les cent
volumes lus, laissant l'impression la plus confuse!
En politique que nous enseigne-t-il? Liberalisme ou despotisme? Plus
celui-ci que celui-la, sans doute, mais encore les deux. Il n'a pas
laisse de donner dans l'optimisme (nous l'avons vu) et par consequent
dans le liberalisme de son temps. Il n'a pas laisse de croire l'homme
bon, capable de progres par l'intelligence et le "lumieres". Il le dit,
quelquefois: "Non, Monsieur, tout n'est pas perdu quand on met le peuple
en etat de s'apercevoir qu'il a un esprit. Tout est perdu au contraire
quand on le traite comme une troupe de taureaux. Croyez-vous que le
peuple ait lu et raisonne dans les guerres civiles de la Rose rouge et
de la Rose blanche, dans les horreurs des Armagnacs et des Bourguignons,
dans celles de la Ligue?..." On pourrait trouver quelques passages de ce
genre dans ses ouvrages. Il aimait meme a prononcer le mot de liberte.
On ne combat point une autorite, sans se persuader a soi-meme qu'on est
liberal. Or il combattait energiquement l'autorite religieuse.--Mais il
est difficile de savoir ce qu'il entendait par ce mot de liberte. Toutes
les formes du liberalisme, c'est-a-dire, sans doute, de quelque chose
s'opposant a l'omnipotence de l'Etat, lui sont odieuses. Il a deteste
les Parlements, les Etats generaux et la liberte de la presse. On
peut citer, de la _Henriade_, une jolie definition, et elogieuse, du
gouvernement parlementaire anglais; mais s'il faut prendre la _Henriade_
pour autorite en matiere politique, on y trouve aussi cette jolie
epigramme contre le gouvernement par les assemblees:
De mille deputes l'eloquence sterile
Y fit de nos abus un detail inutile:
Car de tant de conseils l'effet le plus commun,
Est de voir tous nos maux sans en soulager un.
Pour dire tout un peu courtement, mais assez juste, Voltaire ne s'est
pas applique a la
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