ps qu'ils
auraient du hacher.
Pardaillan, lorsqu'il avait lache prise, etait a moitie evanoui.
Lorsqu'il parvint, sans se faire du mal, au bas de la pente, il demeura
etendu a terre, sans connaissance.
Longtemps, il resta ainsi prive de sentiment. Petit a petit, il revint a
lui et jeta autour de lui un regard, sans vie.
Il se trouvait dans un cachot de dimensions exactement egales a celles
de la chambre d'ou il venait d'etre precipite. Le plancher d'acier
etait remonte automatiquement et constituait le plafond de sa nouvelle
cellule.
Ici, comme a l'etage superieur, il n'y avait aucun meuble, pas d'issues
visibles autres qu'une porte de fer dument verrouillee. Seulement, ici
le sol etait en terre battue, les murs etaient epais et couverts d'une
couche de moisissure et de salpetre, l'air chaud et fetide.
Pardaillan regarda tous ces details d'un oeil sans expression et ne vit
rien. Il prit un coin de son manteau qui avait roule avec lui, il se mit
a le tortiller comme un enfant qui, d'un chiffon, s'amuse a fabriquer
une poupee, et il eclata de rire.
Longtemps, avec cette gravite particuliere aux tout-petits et aux grands
dont l'intelligence s'est eteinte, il s'occupa a cette distraction
enfantine.
Comme un enfant, il parlait a la poupee, que ses doigts tortillaient
inlassablement; il lui disait des choses pueriles qui n'avaient aucun
sens, il la pressait dans ses bras, la repoussait, la grondait avec
des airs courrouces, puis la reprenait, la bercait, la consolait et,
frequemment, sans motif apparent, il laissait echapper le meme eclat de
rire sans expression.
Ce jeu dura des heures sans qu'il parut se lasser; il n'avait plus
conscience du temps.
La porte s'ouvrit. Un moine parut. Il apportait un pain et une cruche
d'eau. Mais sans doute craignait-on un retour d'intelligence, une crise
de revolte et de fureur, car ce moine, solidement bati, tenait un fouet
a la main.
Il ne fit pas un geste de menace, il ne parut meme pas regarder le
prisonnier. Sa presence seule suffit. Des qu'il apercut ce moine,
Pardaillan poussa un cri de detresse, se blottit dans un coin et,
cachant son visage dans son bras replie--le geste d'un enfant qui veut
se garer de la taloche--il hoqueta d'une voix suppliante:
"Ne... me... battez pas!... Ne me battez pas!"
Le moine posa tranquillement a terre le pain et la cruche et le regarda
un instant curieusement. Lentement, il leva le bras arme du fouet.
"Grace!" gemit Pardai
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