n souvenir... Peut-etre, toi
aussi, a l'imitation de Pardaillan le fou, as-tu resolu de vivre
eternellement fidele au souvenir d'une morte... une morte souillee!
D'un bond, le Torero fut sur elle et lui saisit le poignet, et, avec des
yeux de dement, il lui cria dans la figure:
--Repetez... repetez ces infames paroles... et, j'en jure Dieu, votre
derniere heure est venue!...
Fausta ne sourcilla pas. Elle ne chercha pas a se degager de son
etreinte. Seulement, sa main libre alla fouiller dans son sein et en
sortit un mignon petit poignard.
--Une simple piqure de ceci, dit-elle froidement, et tu es mort. La
pointe de ce stylet a ete plongee dans un poison qui ne pardonne pas.
Profitant de sa stupeur, elle se degagea d'un geste brusque, et,
s'adossant a la cloison, de sa voix implacable, elle reprit:
--Je repete: Pardaillan est mort fou... et c'est mon oeuvre... Ta
fiancee est morte souillee... et c'est encore mon oeuvre... Et, toi, tu
vas mourir desespere... et ce sera mon oeuvre, encore, toujours!...
En disant ces mots, elle actionna le ressort qui ouvrait la porte
secrete, et, sans se retourner, elle fit un bond en arriere.
Elle se heurta a une poitrine humaine. Un homme etait la... derriere
cette porte secrete qu'elle croyait etre seule a connaitre... Un homme
qui avait entendu, peut-etre, ce qu'elle venait de dire. Qui etait cet
homme? Peu importait. L'essentiel etait qu'il disparut. Elle leva le
bras arme du poignard empoisonne et l'abattit dans un geste foudroyant.
Sa main fut happee au passage par une autre main, une tenaille vivante
qui lui broya le poignet et l'obligea a lacher l'arme mortelle, ensuite
de quoi la tenaille la ramena dans le cabinet, cependant qu'une voix
narquoise qu'elle reconnaissait enfin disait:
--J'entends parler de mort, de poison, de folie, de torture, que sais-je
encore! J'imagine que Mme Fausta doit avoir un entretien d'amour...
Toutes les fois que Fausta parle d'amour, elle prononce le mot: mort.
A ces paroles, a cette apparition inattendue, un double cri, jete sur un
ton different, retentit:
--Pardaillan!...
--Moi-meme, madame, fit Pardaillan, qui resta devant la porte secrete
comme pour en interdire l'approche a Fausta.
Et, de cette voix blanche qu'il avait dans ses moments de colere
terrible, il reprit:
--Mon compliment, madame, ceux que vous tuez se portent assez bien.
Dieu merci!... Et quant a la folie furieuse dont vous parliez tout
a l'heure... peu
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