visible, etait une
epee de combat, une longue, solide et merveilleuse rapiere, signee d'un
des meilleurs armuriers de Tolede.
Pardaillan l'accepta d'autant plus volontiers que ce n'etait pas la une
arme de parade, mais une bonne et solide rapiere tres simple. Seulement,
en rentrant a l'auberge, il s'apercut que cette rapiere si simple avait
sa garde enrichie de trois diamants dont le plus petit valait pour le
moins cinq a six mille ecus.
Le Chico, qui se remettait a vue d'oeil, grace a la constante
sollicitude de "sa petite maitresse", se vit doter, par la generosite
reconnaissante du Torero, d'une somme de cinquante mille livres, ce
qui ne contribua pas peu a le faire bien voir du brave Manuel, lequel
n'avait pas consenti sans faire la grimace au mariage de sa fille, la
jolie et riche Juana, avec ce bout d'homme, gueux comme Job de biblique
memoire.
Pardaillan voulut assister au mariage du nain, estimant qu'il lui devait
bien cette marque d'amitie.
D'ailleurs on peut dire sans exagerer que ce mariage fut un veritable
evenement et que tout ce que la ville comptait de huppes et meme de
gens de la cour eut la curiosite d'assister a cette union qualifiee
d'extravagante par plus d'un. Mais, quand on vit l'adorable couple
qu'ils formaient, un concert de louanges et de benedictions s'eleva de
toutes parts.
Il va sans dire que, des que le petit homme avait ete en etat de le
faire, Pardaillan avait repris consciencieusement ses lecons d'escrime
et se montrait surpris et emerveille des progres rapides de son eleve.
Enfin, Pardaillan reprit la route de France, emmenant avec lui le Torero
et sa fiancee, la jolie Giralda, lesquels avaient resolu de s'unir en
France meme.
Un mois environ apres son depart de Seville, Pardaillan apportait a
Henri IV le precieux document conquis au prix de tant de luttes et de
perils, et lui rendait un compte minutieux de l'accomplissement de sa
mission.
--Ouf! s'ecria le Bearnais en dechirant en mille miettes, avec une
satisfaction visible, le fameux parchemin. Ventre-saint-gris! monsieur,
je vous devrai deux fois ma couronne... Ne dites pas non... J'ai bonne
memoire. Ca, voyons, demeurerez-vous intraitable et ne pourrai-je rien
pour vous?
--Ma foi, sire, repondit Pardaillan avec son sourire bon enfant, voici
qui tombe a merveille. J'ai precisement une faveur a demander a Votre
Majeste.
--Bon! fit joyeusement le roi. Voyons la faveur... et si vous n'etes pas
trop exigeant...
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