e souvenir. D'Espinosa!...
je connais ce nom-la...
Et, tout a coup, il parut avoir trouve.
--Oh! s'ecria-t-il, en donnant tous les signes d'une vive terreur...
Oui, je me souviens!... D'Espinosa... c'est un mechant... prenez
garde... il va nous battre!
--Ah! gronda d'Espinosa, tu commences a te souvenir. Oui, je suis
d'Espinosa et toi tu es Pardaillan. Pardaillan, l'ami de Fausta.
--Fausta! dit le fou sans hesitation; j'ai connu une femme qui
s'appelait ainsi. C'est une mechante femme!...
--C'est bien celle-la, sourit d'Espinosa. La memoire te revient tout a
fait.
Mais le dement avait une idee fixe et il la suivait sans defaillir. Il
se pencha sur d'Espinosa et, sur un ton confidentiel:
--Vous me plaisez, dit-il. Ecoutez, je vais vous dire, il ne faut pas
jouer avec d'Espinosa et Fausta. Ce sont des mechants... Ils nous feront
du mal.
--Miserable fou! grinca d'Espinosa, impatiente. Je te dis que d'Espinosa
c'est moi. Rappelle-toi!
Il l'avait pris par les deux mains et, penche sur lui, a deux pouces de
son visage, il fixait sur lui un regard ardent comme s'il avait espere
lui communiquer ainsi un peu de cette intelligence qu'il s'etait acharne
a abolir. Et, soit par hasard, soit qu'il eut reussi a lui imposer sa
volonte, le fou poussa un grand cri, se degagea d'une brusque secousse,
se rencogna dans un angle du cachot, et, d'une voix qui haletait, il
rala:
--Je vous reconnais... Vous etes d'Espinosa... Oui... Je me souviens...
Vous m'avez fait souffrir... la faim, l'horrible faim et la soif...
et cette galerie abominable ou l'on suppliciait tant de pauvres
malheureux!...
--Enfin! tu te souviens!
--N'approchez pas!... hurla le fou au comble de l'epouvante. Je vous
reconnais... Que voulez-vous?
--Cette fois, tu me reconnais bien. Oui, tu etais un homme fort et
vaillant, et maintenant qu'es-tu? Un enfant qu'un rien epouvante.
Et c'est moi qui t'ai mis dans cet etat. Tu me comprends un peu,
Pardaillan; une vague lueur d'intelligence illumine en ce moment ton
cerveau. Mais tout a l'heure la nuit se fera de nouveau en toi et tu
redeviendras ce que tu etais a l'instant: un pauvre fou.
--Et sais-tu qui m'a donne l'idee de t'infliger les tortures qui
devaient faire sombrer ton intelligence? Ton amie Fausta. Oui, c'est
elle qui a eu cette idee que je n'aurais pas eue, je l'avoue. Oui, tu
l'as dit: je vais te tuer. Oh! ne crie pas ainsi. Je ne veux pas te tuer
d'un coup de poignard, ce serait une m
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