t que les autres. Lui et ses gens debarquerent
vis-a-vis d'un corps d'environ six mille Sarrasins a cheval, vers lequel
ils marcherent. Cette cavalerie vint au galop pour les attaquer; mais
eux, sans s'etonner, se couvrant de leurs boucliers, s'arreterent, et
presentant les pointes de leurs lances qui etaient alors beaucoup plus
longues qu'elles ne furent par la suite, firent une espece de bataillon
carre, derriere lequel les troupes qui arrivaient se rangeaient en ordre
de bataille. Les Sarrasins, effrayes d'une telle contenance, n'oserent
entreprendre de les forcer, se contentant de caracoler sans en venir aux
mains; mais ils furent bien plus surpris, lorsque la plupart des troupes
de ce corps etant descendues a terre, ils virent toute cette infanterie
s'ebranler et marcher droit a eux. Alors ils tournerent bride, et
prirent la fuite. La chose se passa a peu pres de meme a la gauche, ou
le comte de Jaffe fit sa descente. Il marcha en avant pour gagner du
terrain, et vint former une meme ligne avec le sire de Joinville. Alors
la cavalerie sarrasine vint encore vers eux pour les attaquer; mais
voyant qu'on ne s'epouvantait point, et qu'on les attendait de pied
ferme, ils retournerent joindre le gros de leur armee.
Les bateaux de la droite, ou etait le roi, aborderent les derniers a
une portee d'arbalete du corps de Joinville. Les soldats du bateau qui
portait la banniere de Saint-Denis, autrement appelee l'oriflamme,
sauterent a terre. Un cavalier sarrasin, ou emporte par son cheval, ou
se croyant suivi de ses gens, vint se jeter au milieu d'eux, le sabre a
la main; mais il fut au meme instant perce de plusieurs coups, et resta
sur la place.
Le roi, voyant la banniere de Saint-Denis arrivee, ne put se contenir,
ni attendre que son bateau gagnat le bord; il se jeta dans la mer, ou
il avait de l'eau jusqu'aux epaules, et, malgre les efforts que fit le
legat pour l'arreter, il marcha droit aux ennemis, _l'ecu au cou, son
heaume sur la tete, et son glaive au poing_. L'exemple du monarque
fut un ordre bien pressant pour les Francais. Les chevaliers qui
l'accompagnaient en firent de meme. Des qu'il eut gagne la terre, il
voulut aller attaquer les Sarrasins, quoiqu'il n'eut encore que tres-peu
de monde avec lui; mais on l'engagea d'attendre que son bataillon fut
forme. Ayant eu le temps de mettre ses troupes en ordre de bataille a
mesure qu'elles abordaient, il se mit a leur tete, et marcha droit aux
ennemis qui s'etaient r
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