maine de
celui d'Alep, qui, ayant trouve le moyen de le faire empoisonner, le
forca de retourner en Egypte, ou il ne fit plus que languir. Cependant
le calife de Bagdad agit si prudemment aupres d'eux par ses envoyes,
qu'il leur fit conclure une suspension d'armes, afin d'etre en etat de
repousser l'armee chretienne, qui etait sur le point de les attaquer.
Cependant le roi se disposait serieusement a partir: la perte qu'il
avait faite de beaucoup de gens de sa brave noblesse et de soldats, par
les maladies, etait en plus grande partie reparee par l'arrivee d'un
grand nombre de croises qui n'avaient pu partir de France avec la grande
flotte. Un renfort considerable fut amene par Guillaume de Salisbery,
surnomme _Longue-Epee_, qui arriva en Chypre avec deux cents chevaliers
anglais. Le roi leur fit le plus gracieux accueil; il recommanda surtout
aux Francais d'user a l'egard du comte et de ses chevaliers de beaucoup
de politesse et de complaisance, et il conjura les uns et les autres
de suspendre, du moins pendant la guerre sainte, l'antipathie des
deux nations, et de penser qu'ils combattaient sous les enseignes de
Jesus-Christ, leur unique chef.
La saison s'avancait, et tout se preparait au depart. Des l'arrivee du
monarque en Chypre, il s'etait tenu un conseil de guerre, dans lequel
les avis avaient ete fort partages sur les projets de la campagne. Les
uns voulaient qu'on allat droit a Ptolemais, ou Saint-Jean-d'Acre,
persuades qu'on reprendrait aisement le royaume de Jerusalem, dont
toutes les places etaient demantelees. Le principal but des croises,
disaient-ils, etait de recouvrer la sainte cite, et Louis acquerait une
gloire immortelle s'il pouvait retablir le culte du vrai Dieu dans ces
memes lieux ou le salut du monde avait ete opere.
Ainsi pensaient les Templiers et les Hospitaliers, soit que ce parti
leur parut veritablement le meilleur, soit qu'il fut plus conforme a
leurs interets particuliers.
Les autres, au contraire, ayant le roi de Chypre a leur tete,
pretendaient que la conquete du royaume de Jerusalem, a la verite
facile, ne pouvait pas se soutenir contre la puissance du soudan
d'Egypte; qu'avant que toutes les places en fussent retablies, la
plupart des croises seraient retournes en France; qu'il fallait aller
a la racine du mal, en attaquant Damiette; qu'apres que les soudans
auraient ete domptes, on irait prendre possession de la Palestine. Louis
fut touche de ces raisons, et encore plus lors
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