puisqu'il etait force de faire la
route a pied, avec ses bottes a l'ecuyere, a cause que, le jour avant,
dans un combat contre les Cosaques, ou il en avait tue trois, son
cheval avait attrape un ecart, de sorte qu'il etait oblige de le
conduire par la bride. Heureusement que l'homme qui me suivait, dans
ce moment, etait mon homme de confiance, et qui avait, dans son sac,
une paire de souliers a moi, que je donnai au pauvre Flament, de
maniere a ce qu'il puisse se chausser comme un fantassin, et marcher
de meme. Je lui fis mes adieux sans penser que je ne le reverrais
plus; j'appris, deux jours apres, qu'il avait ete tue pres d'un bois,
au moment ou, avec d'autres traineurs comme lui, il allait faire du
feu pour se reposer.
Le 2, avant d'arriver a Slawkowo, nous vimes, sur notre gauche, tenant
a la route, un blockhaus, ou station militaire, espece de grande
baraque fortifiee, occupee par des militaires de differents regiments
et des blesses. Ceux qui etaient les moins malades et qui purent
suivre, se joignirent a nous, et les autres furent mis, autant que
possible, sur des voitures; tant qu'aux plus malades, ils furent
abandonnes a la clemence de l'ennemi, ainsi que des medecins et
chirurgiens qu'on laissa pour en avoir soin.
IV
Dorogoboui.--La vermine.--Une cantiniere.--La faim.
Le 3, nous fimes sejour a Slawkowo; pendant toute la journee, nous
apercumes les Russes sur notre droite. Le meme jour, les autres
regiments de la Garde, qui avaient fait sejour en arriere, se
reunirent a nous.
Le 4, nous fimes une marche forcee pour arriver a Dorogoboui, ville
aux choux; c'est le nom que nous lui avions donne, a cause de la
grande quantite de choux que nous y trouvames en allant a Moscou.
C'est aussi de cette ville que, le 25 aout, l'Empereur fit faire, dans
toute l'armee, le denombrement des coups de canon et de fusil que
l'armee avait a tirer pour la grande bataille. A 7 heures du soir,
nous en etions encore eloignes de deux lieues; c'est avec beaucoup de
peine que nous pumes l'atteindre, car la quantite de neige qu'il y
avait deja nous empechait de marcher. Nous fumes meme egares pendant
quelque temps, et, pour que les hommes qui se trouvaient en arriere
pussent nous rejoindre, pendant plus de deux heures l'on battit la
marche de nuit, jusqu'au moment ou nous arrivames sur l'emplacement de
la ville, car, a quelques maisons pres, elle avait ete brulee comme
beaucoup d'autres.
Il etait bien 11 heures lor
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