ble ou nous etions, nous ou les habitants qui etaient en petit
nombre, il n'y avait pas de musique possible, et surtout a pareille
heure.
Tout en avancant et en faisant des reflexions, mon pied droit, qui
commencait deja a etre gele et a me faire souffrir, rencontra quelque
chose de dur qui me fit pousser un cri de douleur et tomber de mon
long sur un cadavre, ma figure presque sur la sienne. Je me relevai
peniblement. Malgre l'obscurite, je reconnus que c'etait un dragon,
car il avait encore son casque sur la tete, attache avec les
jugulaires, et son manteau sur lequel il etait tombe, il n'y avait
probablement pas longtemps.
Le cri de douleur que j'avais jete en tombant, fut entendu par un
individu qui etait sur ma droite et qui me cria d'aller de son cote,
en me faisant comprendre qu'il y avait longtemps qu'il m'attendait.
Surpris et content de trouver quelqu'un dans un endroit ou je me
croyais seul, j'avancai dans la direction d'ou partait la voix. Plus
je m'approchais, plus il me semblait la reconnaitre. Je lui criai:
"C'est toi, Beloque[27]?--Oui!" me repondit-il, et, nous ayant
reconnus l'un et l'autre, il fut aussi surpris que moi de nous
trouver, a pareille heure, dans un lieu aussi triste et ne sachant pas
plus que moi ou il etait. Il m'avait primitivement pris pour un
caporal qui etait alle chercher des hommes de corvee pour transporter
des malades de sa compagnie que l'on avait laisses a la porte de la
ville, lorsque l'on etait arrive; et qui, ensuite, avec quelques
hommes pour porter et aider a marcher ces malades, avait pris le
chemin du rempart pour eviter de monter la rampe de glace. Mais,
arrives ici, etant trop faibles pour marcher, et les hommes de corvee
ne pouvant plus les porter, ils etaient tombes a la place ou je les
voyais. Le premier qu'il avait envoye au camp n'etant pas revenu, il
avait envoye successivement les deux autres, de maniere qu'il se
trouvait seul. C'etaient precisement les hommes que nous avions
laisses a notre arrivee dans la baraque, ou ensuite j'en avais trouve
un de mort.
[Note 27: Beloque etait un de mes amis, sergent velite comme moi.
(_Note de l'auteur_.)]
Je lui contai comment je m'etais perdu; je lui parlai de mon aventure
dans la cave, mais je n'osai lui parler de la musique que j'avais cru
entendre, de crainte qu'il ne me dise que j'etais malade. Il me pria
de rester pres de lui; c'etait bien ma pensee. Un instant apres, il me
demanda pourquoi j'avais jete un c
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