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avec moi. Il me regarda sans me repondre; je remarquai qu'il etait enveloppe d'une grosse capote doublee en fourrure et dont il cherchait a se debarrasser. Je voulus l'aider a se relever, mais la chose fut impossible. En le prenant par le bras, je vis qu'il avait des epaulettes d'officier superieur. Il me parla encore un peu de revue, de parade, et finit par tomber sur le cote, la figure sur la neige. Enfin, je dus l'abandonner, car il m'etait impossible de rester plus longtemps sans m'exposer a partager le sort de ces deux infortunes. Je passai la main sur la figure du premier; elle etait froide comme la glace. Il avait cesse de vivre. A cote se trouvait une espece de carnassiere que je ramassai, esperant y trouver quelque chose. Mais je m'apercus qu'il n'y avait que des chiffons et des papiers. J'emportai le tout. Ayant regagne la route, je me remis a marcher, mais lentement, ecoutant souvent, car il me semblait toujours entendre quelqu'un se plaindre. L'espoir de rencontrer quelque bivac me fit, autant que je le pouvais, doubler le pas. J'arrivai dans un endroit de la route que je trouvai presque ferme de chevaux morts et de voitures brisees. Tout a coup, je me laisse aller malgre moi et je tombe assis sur le cou d'un cheval mort qui barrait le chemin. Autour etaient etendus sans mouvement des hommes de differents regiments. J'en remarquai meme plusieurs de la Jeune Garde, faciles a reconnaitre au shako; j'ai suppose, depuis, qu'une partie de ces hommes etaient morts en voulant depecer le cheval pour le manger, mais qu'ils n'en avaient pas eu la force et qu'ils avaient succombe de froid et de faim, comme cela arrivait tous les jours. Dans cette triste situation, me voyant seul au milieu d'un immense cimetiere et d'un silence epouvantable, les pensees les plus sinistres vinrent m'assaillir: je pensai a mes camarades dont je me trouvais separe comme par une fatalite, ensuite a mon pays, a mes parents, de maniere que je me mis a pleurer comme un enfant. Les larmes que je versai me soulagerent et me rendirent le courage que j'avais perdu. Je trouvai sous ma main, contre la tete du cheval sur lequel j'etais assis, une petite hache, comme nous en portions toujours dans chaque compagnie lorsque nous etions en campagne. Je voulus m'en servir pour en couper un morceau, mais je n'en pus venir a bout, car il etait tellement durci par la gelee que j'aurais plutot coupe du bois. Enfin, j'epuisai le reste de mes forces con
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