l ne les voyait plus, il se mit
a jurer: "Mille tonnerres! je comptais sur eux pour avoir du tabac.
Les poltrons! Ils n'osent plus nous suivre! Ils ont peur!"
Nous continuions a marcher le plus pres qu'il nous etait possible de
la foret, afin de nous cacher derriere les buissons, mais nous fumes
forces d'en sortir par la chute de plusieurs arbres que la tempete du
matin avait fait tomber, et qui barraient notre chemin. Nous fumes
obliges d'appuyer a droite, pour tourner. En faisant cette
contremarche, nous regardames encore en arriere: nous apercumes nos
deux individus en arriere l'un de l'autre de plus de trente pas. Il
est probable que le premier nous avait apercus, car il doubla le pas
de son cheval, comme pour s'assurer de quelque chose. Ensuite il
s'arreta de maniere a attendre celui qui le suivait. Nous pouvions les
voir sans etre vus, car nous etions rentres precipitamment dans le
bois. Notre but etait de les attirer le plus loin possible, afin que
ceux qui etaient a la peche de leurs camarades ne pussent venir a leur
secours, si un combat s'engageait. Pour cela, nous marchions le plus
vite possible, mais difficilement, quelquefois dans le bois, ensuite
dehors, suivant le terrain.
Il y avait deja une demi-heure que nous etions a faire cette
manoeuvre, lorsque nous fumes arretes par un banc de neige qui allait
se perdre dans un ravin sur notre droite. Nous fumes forces de faire
quelques pas en arriere, afin de chercher une issue pour entrer dans
la foret et nous y cacher. Un instant apres, les Cosaques etaient pres
de nous, et nous aurions pu les descendre facilement, mais Picart, qui
savait faire la guerre, me dit: "C'est de l'autre cote du banc de
neige que je veux les avoir; il ne sera pas facile aux autres de leur
porter secours!"
Lorsqu'ils virent qu'il n'y avait pas possibilite de franchir cet
obstacle, ils prirent le galop et nous les vimes descendre dans le
ravin et chercher a tourner le banc de neige. De notre cote, nous
avions trouve un passage qui nous fit arriver, presque en meme temps,
de l'autre cote. De l'endroit ou nous etions, nous pouvions les
apercevoir sans etre vus. Nous profitames du moment qu'ils etaient
dans le fond pour sortir de la foret et marcher plus a notre aise,
mais, au moment ou nous pensions en etre debarrasses pour un temps et
ou je m'arretais pour respirer, car les jambes commencaient a me
manquer, Picart, se retournant pour voir si je le suivais, apercoit a
une petite di
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