dait jusqu'a terre. Sur le cote, une
premiere porte aussi en chaume, mais tellement couverte de neige qu'il
n'est pas etonnant que nous ne l'ayons pas vue de suite. Picart etant
entre sous le toit, arriva a une seconde porte en bois et frappa
d'abord doucement; personne ne repondit. Une seconde fois, meme
silence. Alors, s'imaginant qu'il n'y avait pas d'habitants, il se
disposa a enfoncer la porte avec la crosse de son fusil, mais une voix
faible se fit entendre, la porte s'ouvrit et une vieille femme se
presenta, tenant a la main, pour s'eclairer, un morceau de bois
resineux tout en flammes, qu'elle laissa tomber de frayeur en voyant
Picart, et se sauva tout epouvantee!
Mon camarade ramassa le morceau de bois encore allume et avanca encore
quelques pas. Comme j'avais fini d'attacher le cheval sous
l'avant-toit qui masquait la porte, j'entrai et je l'apercus avec sa
lumiere a la main, au milieu d'un nuage de fumee. Avec son manteau
blanc, il ressemblait a un penitent de la meme couleur. Il jetait des
regards a droite et a gauche, ne voyant personne, parce qu'il ne
pouvait pas voir dans le fond de l'habitation. Lorsqu'il se fut assure
que j'etais entre, rompant le silence et s'efforcant de faire une voix
douce, il souhaita le mieux qu'il put le bonjour en langue polonaise.
Je le repetai, mais d'une voix faible. Notre bonjour, quoique mal
exprime, fut entendu, car nous vimes venir a nous un vieillard qui,
aussitot qu'il apercut Picart, se mit a crier: "Ah! ce sont des
Francais; c'est bon!" Il le dit en polonais et le repeta en allemand.
Nous lui repondimes de meme que nous etions Francais et de la Garde de
Napoleon. Au nom de Napoleon et de sa Garde, le brave Polonais (car
c'en etait un) s'inclina et voulait nous baiser les pieds. Au mot de
_Francais_, repete par la vieille femme, nous vimes deux autres femmes
plus jeunes sortir d'une espece de cachette, qui s'approcherent de
nous en manifestant de la joie. Picart les reconnut pour celles qu'il
avait vues dans la foret et dont nous avions suivi les traces.
Il n'y avait pas cinq minutes que nous etions chez ces braves gens,
que je faillis etre suffoque par la chaleur a laquelle je n'etais plus
habitue, ce qui me forca a me retirer pres de la porte, ou je tombai
sans connaissance.
Picart se retourna et courut pour me secourir, mais la vieille femme
et une de ses filles m'avaient deja releve et m'avaient fait asseoir
sur une espece d'escabelle en bois. Lorsque je fus
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