coup, une autre terreur me prend en pensant qu'il pouvait bien
contenir de la poudre!
[Note 33: Bon Francais! (_Note de l'auteur_.)]
A peine ai-je fait cette reflexion, que, tout fatigue que je suis, je
me leve et, ne faisant qu'un saut au-dessus du feu et du pauvre diable
qui etait devant moi, je me mis a courir a plus de vingt pas sur la
gauche, mais, _chopant_ a une cuirasse qui se trouvait sur mon
passage, j'allai mesurer la terre de tout mon long. J'eus encore le
bonheur, dans cette chute, de ne pas me blesser, car j'aurais pu
rencontrer, en tombant, quelques debris d'armes, et il y en avait
beaucoup d'eparses dans cet endroit; j'ai pu m'en assurer lorsqu'il
commenca a faire jour. M'etant releve, je me mis a marcher en
reculant, et toujours les yeux fixes sur l'endroit que je venais
d'abandonner, comme si vraiment j'avais ete certain qu'il existat de
la poudre dans le caisson et qu'il allat faire explosion. Peu a peu
revenu de ma peur, je regagnai l'endroit que j'avais quitte sottement,
car je n'etais pas plus en surete a vingt pas que contre le feu. Je
pris les morceaux de bois enflammes, je les portai avec precaution a
l'endroit ou j'etais tombe; ensuite je pris la cuirasse a laquelle
j'avais _chope_, afin de m'en servir a ramasser de la neige et a
eteindre le feu. Mais a peine avais-je commence cette besogne, qu'un
bruit de fanfare se fit entendre, et, ayant attentivement ecoute, je
reconnus facilement les clairons de la cavalerie russe, qui
m'annoncaient que je n'etais pas loin d'eux. A ce son national,
j'avais vu le Cosaque lever la tete. Je cherchai, en l'examinant
attentivement, a lire sur sa physionomie quelle etait sa pensee, car
le feu eclairait encore assez pour distinguer ses traits. Il semblait
vouloir aussi lire sur ma figure l'impression que ce bruit inattendu
avait produit sur moi. C'est ainsi que j'ai pu voir comme cet homme
etait hideux: une carrure d'Hercule, des yeux louches se renfoncaient
sous un front bas et saillant; sa chevelure et sa barbe, rousses et
drues comme un crin, donnaient a ses traits un caractere sauvage. Dans
ce moment, je crus voir qu'il souffrait horriblement de sa blessure,
car il faisait des mouvements comme quelqu'un qui a une forte colique
et, par moments, il grincait des dents, qui ressemblaient a des crocs.
J'avais interrompu mon ouvrage, et, ne sachant plus que faire,
j'ecoutais stupidement cette musique sauvage, quand, tout a coup, un
autre bruit se fait enten
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