pas que vous me laissiez dans une misere
absolue en pays etranger. Je vis, depuis deux mois, des cinq cents
francs que vous m'aviez envoyes. Courez donc, je vous en supplie, chez
le banquier, et faites-moi expedier l'argent que vous avez, pour moi,
entre les mains.
Vous avez du toucher trois mois chez Salmon (mars, avril, mai); ce qui
fait neuf cents francs; plus cinq cents de Buloz; quatorze cents.--Mon
loyer paye et mes petites dettes envers vous, que je vous prie de
prelever avant tout, il doit vous rester mille francs. Pendant ce
temps-la, je dine avec la plus stricte economie et je couche sur un
matelas par terre, faute de lit. Si ce retard est cause par votre
negligence, vous devez en avoir quelque remords; s'il est cause par un
accident, tirez-moi bien vite d'anxiete. S'il y a quelque autre raison
qui vous justifie, ecrivez-la en deux mots, je l'accueillerai avec
joie; si mes affaires vous ennuient, dites-le sincerement. Je vous
serai reconnaissante du passe et je ne vous demanderai rien jusqu'a ce
que vos preoccupations aient cesse.
Vous aviez de bonnes nouvelles a me donner du travail et de la sante
de mon fils; comment se fait-il que, apres deux mois d'attente, je les
recoive d'un autre? Ah! mon enfant, votre corps ou votre coeur est
malade.
Adieu, mon ami; surtout ne soyez pas malade. Tout le reste ne sera
rien pour moi.
Ne me parlez jamais politique dans vos lettres. D'abord, je m'en
soucie fort peu; ensuite, c'est une raison certaine pour qu'elles ne
me parviennent pas.
CXVI
A MAURICE DUDEVANT. A PARIS
Milan, 29 juillet 1834.
Mon gros minet,
Boucoiran m'a ecrit que la distribution des prix serait pour le 28
aout; toi, tu m'as ecrit que ce serait le 18. Je ne sais lequel de
vous deux se trompe.
Dans tous les cas, je serai a Paris avant le 18, si je ne creve pas en
route! vraiment, il y a de quoi par la chaleur qu'il fait ici!
J'espere qu'en approchant de la Suisse, je vais avoir plus frais. Je
voudrais t'avoir avec moi, mon cher petit, pour te montrer toutes les
belles choses que je vois.
Mais nous reviendrons ensemble dans ce beau pays d'ici a quelques
annees. Je n'ai pas de plaisir reel sans toi, mon enfant. Depeche-toi
de grandir, pour que nous ne nous quittions plus.
Je t'embrasse mille fois. Adieu.
Paris est en fete aujourd'hui, et tu es sorti, j'imagine? Tu cours, tu
t'amuses; penses-tu un peu a moi?
CXVII
A M. FRANCOI
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