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e cela dure encore. Je suis guerie, non que je sois heureuse d'ailleurs, mais parce que je suis habituee et resignee a mes maux, et que le sentiment de la douleur n'egare plus mon jugement. J'ai ete vers vous, repentante et attristee de mes doutes interieurs, et vous m'avez si bien recue, vous m'avez temoigne une affection si vraie, que j'ai ete tout a fait guerie en vous pressant la main. Il y a bien des explications, bien des justifications, bien des attestations, dans une brave poignee de main. On dit qu'une poignee de main d'amitie vaut mieux que mille baisers d'amour. Comment veux-tu que celle que je t'ai donnee en arrivant et en partant ne soit pas sincere? Nous sommes les deux plus vieux camarades _de la societe_, et je sais qu'en toute occasion, tu m'as defendue contre les injustices d'autrui. Je sais que tu n'as pas doute de moi quand on me calomniait, et que tu m'as pardonne, quand je faisais les folies que le monde traite de fautes. Que me faut-il de plus? Tu as de l'esprit par-dessus le marche, et ta societe est agreable et recreante; c'est du luxe, mon enfant. Tu as une femme gentille et excellente, qui m'a traitee tout de suite comme une vieille amie. La meilleure preuve que je puisse avoir de ton affection, c'est la conduite d'Eugenie[1] envers moi. Tout cela m'a fait un bien que je n'ai pas su vous exprimer, mais que je croyais vous avoir fait comprendre en revenant de Valencay. Jamais je n'avais eu le coeur si doucement emu, si attendri, si console au milieu des sujets de douleur les plus profonds et les plus graves. Si quelquefois tu as mal compris mon rire et mon visage, c'est apparemment la faute de ce combat interieur entre mes peines secretes et le bonheur qui me vient de vous autres. Apres tout, vous me restez, et, quand j'aurais tout perdu d'ailleurs, vous seriez encore pour moi un bienfait bien grand, bien reel. Ne craignez plus que je le meconnaisse; j'en ai trop senti le prix durant ces derniers jours. C'est en vous, mes amis, que je chercherai mon refuge, et, si le degout de la vie me travaille encore, j'irai encore vous demander de m'y rattacher. Mais la premiere condition de mon bonheur serait de vous trouver tous heureux. Vous l'etes, n'est-ce pas? ne me dis pas le contraire; cela m'effrayerait trop. Tu es de nature pensive et melancolique, je le sais; mais cela ne rend ni altier ni ingrat. Des joies bien vraies se sont mises dans ta vie, a la place des ennuis et du vide dont tu
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