Richard pour de galants
hommes qui se seraient adresses a moi, s'ils avaient eu la moindre
velleite de tirer une piece de mon livre. D'ailleurs, ils ont fait dire
dans la presse que _Pierre Gendron_ etait ecrit avant l'Assommoir, et
cela doit suffire. Certes, je ne reclame pas une enquete. Je m'estime
simplement heureux que les directeurs ne se soient pas montres plus
empresses de jouer la piece; car, dans ce cas, ce serait moi qui aurais
pu etre traite de plagiaire.
Seulement, la rencontre entre les deux oeuvres est vraiment prodigieuse.
Il y a la un cas litteraire sur lequel je me permets d'insister,
uniquement pour la curiosite du fait.
Imaginez qu'un auteur dramatique veuille tirer un drame de
l'_Assommoir_. La grosse difficulte qu'il rencontrera sera le noeud meme
du drame, le menage a trois, le retour de l'ancien amant que le mari
ramene aupres de sa femme, un jour de soulerie. Dans la vie reelle, j'ai
connu des Coupeau, lentement hebetes par la boisson. Mais un romancier
seul peut employer aujourd'hui de tels personnages, parce qu'il a le
loisir de les analyser a l'aise et de tirer d'eux les terribles lecons
de la verite. Au theatre, ils restent encore d'un maniement presque
impossible.
Tout le probleme, pour un auteur dramatique, serait donc d'accommoder
Coupeau et Lantier, de facon a ce qu'ils pussent paraitre devant le
public, sans trop le revolter. Il faudrait, tout en gardant la situation
du menage a trois, trouver un arrangement qui maintiendrait l'aventure
dans cette convention d'honnetete scenique, hors de laquelle une piece
est fort compromise. En un mot, etant donne Gervaise, Lantier et
Coupeau, il s'agirait de les conserver tous les trois, et pourtant de
les rendre possibles, en modifiant legerement les donnees du roman.
Eh bien, MM. Lafontaine et Richard ont trouve une solution tres
agreable. J'avais songe a ces choses, avant la representation de leur
piece, et j'ai ete reellement surpris de ne pas avoir eu l'idee d'une
solution aussi habile. Certainement, ce qui m'a empeche de la trouver,
c'est la pensee qu'un roman transporte au theatre doit rester entier.
Mais des auteurs qui ne seraient tenus a aucun respect envers
l'_Assommoir_, et qui prefereraient meme s'en ecarter un peu,
n'inventeraient pas une adaptation plus adroite que _Pierre Gendron_. Et
cela est d'autant plus miraculeux que cette comedie a ete ecrite avant
le roman.
Voici l'adaptation. Faites que Coupeau ne soit pas marie av
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