motion, lorsqu'il est demontre au
contraire que la plus forte emotion nait de la verite la plus franche et
la plus simple.
Tel est donc, pour moi, le grand merite de ce troisieme acte. Daniel
reste en bois, sauf deux ou trois cris, car Daniel est un etre abstrait,
fait sur un type ridicule de perfection. Mais Coralie se montre bien
vivante, et cela suffit pour donner a l'acte un souffle de vie. Je le
repeterai: l'acte a reussi parce que, d'un bout a l'autre, il echappe
aux ficelles ordinaires, et qu'il obeit simplement a des ressorts
logiques et humains, pris dans le caractere meme des personnages. Je
n'insisterai pas sur le quatrieme acte, bien qu'il contienne peut-etre
la pensee morale et philosophique de l'auteur. En tout cas, je vois la
une concession aux necessites sceniques qui diminue l'oeuvre et lui
enleve toute largeur.
Maintenant, M. Delpit me permettra-t-il de lui donner quelques conseils,
comme mon metier de critique m'y oblige? Je vois partout qu'on l'acclame
et qu'on le grise, en le poussant dans une voie qui me parait facheuse.
Ainsi, je nommerai M. Sarcey, dont l'autorite est reelle en matiere
dramatique, et qui, selon moi, fait beaucoup de victimes par les
enseignements de son feuilleton. Ecoutez ce qu'il ecrit a propos du
_Fils de Coralie_: "La belle chose que le theatre! Personne a ce moment
ne pensait plus a l'indignite de la mere, a l'impossibilite du sujet.
Personne ne songeait plus a chicaner son emotion. On avait en face
une mere et un fils dans une situation terrible, et les repliques
jaillissaient a coups presses comme des eclats de foudre. Tout le reste
avait disparu." Cela revient a dire en bon francais: "Moquez-vous de la
vraisemblance, moquez-vous du bon sens, mettez simplement des pantins
l'un devant l'autre, dans des situations preparees, et comptez sur
l'emotion du public pour etre absous: tel est le theatre qui est une
belle chose." D'ailleurs, je le sais, M. Sarcey ne se fait pas une autre
idee du theatre, il le juge au point de vue de la consommation courante
du public. Eh bien! que M. Delpit s'avise d'ecouter M. Sarcey, de croire
que tous les defauts disparaissent, lorsqu'on a fait rire ou pleurer une
salle, et il verra le beau resultat a sa cinquieme ou sixieme piece!
Non, il n'est pas vrai que tout disparaisse dans l'emotion purement
nerveuse du public. A ce compte, les melodrames les plus gros et les
plus betes seraient des chefs-d'oeuvre inattaquables, car ils ont
boulevers
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